Josy Gloden (43 ans) vient d’être élu à l’unanimité président de Vinsmoselle. Il succède à Henri Streng, qui avait gardé le siège pendant 14 ans.
La coopérative est, et de très loin, le plus gros acteur de la Moselle viticole. Un changement à sa tête n’est donc pas un évènement anodin, d’autant que Vinsmoselle doit faire face à une période délicate. Josy Gloden le sait bien, il répond librement.
Depuis le lundi 10 juillet, vous êtes le nouveau président de Vinsmoselle. Il s’agit d’une suite logique, puisque votre famille a marqué l’histoire de la coopérative.
Josy Gloden : C’est vrai, j’ai toujours baigné dans cet univers! Mon grand-père, qui s’appelait également Josy, était le cofondateur de la cave coopérative de Wellenstein en 1930 et mon père, Vic, a été un des cofondateurs de Vinsmoselle en 1966 et aussi son premier président. Une fonction qu’il a occupée pendant 37 ans. J’ai toujours été impliqué dans le vignoble et la coopérative. J’avais des responsabilités avec les jeunes vignerons, par exemple. Lorsque, à la maison, nous avons décidé ensemble que je reprenais les vignes, mon père s’est retiré pour que je prenne à mon tour mes responsabilités. Je suis donc entré dans le comité de la cave coopérative de Wellenstein et au conseil d’administration de Vinsmoselle en 2003. Deux ans plus tard, je suis devenu le président de la commission technique.
Ce moment n’est pas facile pour la coopérative. Comment jugez-vous ce modèle d’entreprise ? S’il est parfois dénigré ici, d’autres caves coopératives européennes, notamment en France, sont des modèles économiques enviés…
La coopérative a été créée pour regrouper les vignerons afin qu’ils soient plus forts sur le marché. Aujourd’hui, c’est une ambition qui tient toujours. Cette organisation nous permet d’offrir à la fois des vins dans des volumes importants et des cuvées plus petites – comme celles des jeunes vignerons, les coteaux de Schengen ou les séries « Art & Vin » – uniquement destinées aux clients qui viennent chez nous et à la gastronomie. Aujourd’hui, nous avons 49 références de vin récompensées par les jurys de concours internationaux. C’est une preuve indubitable de la qualité de nos vins!
Il n’empêche, l’image de Vinsmoselle pourrait être meilleure. Comment comptez-vous redynamiser la coopérative ?
Nous sommes critiqués, parfois, mais je ne trouve pas que tout soit justifié. Je considère que pour les crémants, nous sommes les meilleurs. Nous sommes, et de loin, les leaders sur le marché et la qualité est remarquable. La raison en est simple : nous assemblons nos cuvées comme nous le voulons. Les vignerons de la coopérative sont présents sur tous les terroirs et tous les lieux-dits. Et comme nos chefs de cave sont expérimentés, ils savent quoi faire avec ces raisins. Encore une fois, les concours montrent que nos crémants plaisent : partout où nous les présentons, nous ramenons quelque chose. Et puis, au Luxembourg, on les trouve partout, puisque l’on a du volume. Si les gens ne les aimaient pas, ils ne les achèteraient plus. C’est aussi simple que cela! Ceci dit, vous avez raison, il faut que nous renouvelions notre image.
C’est un peu le cas pour toute la Moselle, qui a encore du mal à valoriser ses vins. Depuis toujours, les trois groupements (coopérative, négociants et vignerons indépendants) ont eu du mal à travailler ensemble. Pourtant, ces derniers temps, on sent de nouvelles ambitions avec notamment le succès d’Expovin, une initiative commune. Dressez-vous le même constat ?
Je pense qu’effectivement les lignes sont en train de bouger. Expovin est en effet un bon exemple de ce nouveau dynamisme. Nous pouvons et nous devons proposer de nouveaux concepts et créer de belles choses ensemble.
Au Luxembourg, Bernard Massard – votre principal concurrent – vient également de changer de tête avec l’arrivée d’Antoine Clasen, qui est de votre génération. Est-ce que ce rajeunissement permettra de casser la routine ?
Je m’entends très bien avec Antoine et je suis certain que nous travaillerons sur des projets communs. Il y a indiscutablement un changement de génération sur la Moselle en ce moment. Il faudra saisir les opportunités et aussi savoir prendre des risques. Lorsqu’il y a 25 ans, Constant Infalt, Nico Moschtert et mon père ont décidé de lancer le crémant, il s’agissait d’une sacrée prise de risque. Au départ, tout le monde ne les a pas suivis, mais aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire qu’il s’agit d’un immense succès. Sans le crémant, la Moselle ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui… Notre génération devra-t-elle trouver une nouveauté pour assurer le futur? Peut-être…
Entretien réalisé par Erwan Nonet
Retrouvez l’intégralité de l’interview dans Le Quotidien papier de ce lundi