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Luxembourg : un ban de Sardines contre le populisme


«Nous n'adhérons pas avec cette façon de représenter les gens et nous ne voulons pas que l'Italie soit présentée comme un pays raciste opposé aux migrants», revendiquent les Sardines du Luxembourg. (photo Tania Feller)

Des dizaines de personnes se sont rassemblées dimanche place Clairefontaine à l’appel des Sardines, un mouvement antifasciste lancé il y a deux mois en Italie pour répondre au populisme et au racisme.

Le froid et la grêle n’ont pas empêché quelque 70 personnes, pour la plupart originaires d’Italie, de se rassembler dans la bonne humeur à Luxembourg, afin de marquer leur opposition à la montée du populisme et du racisme en Italie, à une semaine d’élections régionales cruciales dans ce pays. Des manifestations similaires ont rassemblé plusieurs dizaines de milliers de personnes à travers d’autres grandes villes européennes, notamment Bologne, Barcelone ou Munich.

Sur fond de musique italienne (dont le fameux hymne à la résistance Bella ciao), les manifestants ont arboré place Clairefontaine des sardines de papier colorées, symbole du mouvement antifasciste éponyme né il y a deux mois dans la péninsule pour dénoncer la politique de Matteo Salvini et de son parti d’extrême droite, la Ligue du Nord.

Contre «un nouveau fascisme»

Roberto Serra et Antonio Libonati sont à l’origine du rassemblement dans la capitale grand-ducale. «Ce mouvement est contre le populisme, le racisme et la haine. Et contre la désinformation menée par la Ligue, qui tente de monter les gens contre les migrants en déversant des fake news, telles que « Ils vont voler nos emplois et amener la criminalité » ou « L’Europe ne fait rien »», résument-ils.

Une idéologie à laquelle s’oppose fermement Paola, 39 ans, qui a tenu à participer à la manifestation d’hier avec ses trois enfants, Francesco, Cecilia et Ariana, âgés respectivement de 3, 5 et 7 ans. «C’était important de venir avec mes enfants, pour qu’ils comprennent qu’on doit accueillir les migrants, comme nous avons nous aussi été des migrants accueillis au Luxembourg. Eux sont nés ici, mais moi je suis arrivée de Milan en 2013. Et puis, ils ont des camarades de classe venus d’ailleurs et constatent que tout se passe très bien, contrairement à ce qu’ils peuvent entendre parfois dans certains discours.»

«Contrairement à ce que Salvini veut faire croire, ce ne sont pas les immigrés le problème. Il y a d’autres questions à régler : le crime organisé (la mafia), l’évasion fiscale – l’une des plus importantes du monde – l’environnement…», s’insurge Roberto Serra. «C’est un nouveau fascisme. Ce néofascisme n’est certes pas celui qu’on a connu il y a 70 ans, mais il faut veiller à ce qu’il ne revienne pas.»

«Nous n’adhérons pas avec cette façon de représenter les gens et nous ne voulons pas que l’Italie soit présentée comme un pays raciste opposé aux migrants. Nous sommes en faveur de la solidarité et de l’intégration des migrants», poursuit Antonio Libonati, qui signale que les Sardines ne sont pas un parti politique mais un mouvement d’opinion.

«La démocratie est en danger»

C’est d’ailleurs là aussi l’un des enjeux des Sardines : rappeler que la politique se fait aussi par les citoyens, dans la rue. «Il y a une Italie qui rejette le modèle de Salvini. C’est une opinion de plus en plus partagée, mais il faut donner l’envie aux gens de manifester, de faire de la politique dans la rue et pas seulement dans les émissions de télévision», explique Roberto Serra.

«Ce rassemblement montre qu’il est possible d’avoir une confrontation civile démocratique. Avec la montée des nationalismes et des populismes, la démocratie est en danger», alertent Luciano et son épouse, qui ont quitté Gênes pour venir s’installer au Luxembourg il y a un an et demi et avaient instamment tenu à participer au rassemblement de dimanche.

À l’instar de Luigi, 76 ans, originaire de Rome et installé au Luxembourg depuis 43 ans, «nous devons prendre des décisions pour l’avenir concernant les pensions, l’éducation, l’accueil des migrants… Mais nous sommes incapables d’en débattre. Toute occasion de dénoncer cette situation est donc bonne à saisir», explique cet Européen convaincu, qui a aussi vécu en Belgique et en Suisse.

«Les gens ont besoin d’être rassurés sur leur avenir, mais les classes politiques – exception faite du Luxembourg où on est plus réaliste – échouent à le faire. Car c’est un problème qui ne touche pas que l’Italie. Je suis là aussi aujourd’hui parce que je crois qu’il est mieux de vivre dans un grand espace comme l’Europe, et qu’il faut respecter l’information, la liberté d’expression ou encore le droit du travail», poursuit-il, satisfait de l’écho qu’a reçu le mouvement des sardines à Luxembourg. «J’aurais bien sûr préféré que la place Clairefontaine soit pleine, mais c’est déjà pas mal !»

Tatiana Salvan

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