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Du Nord au Sud, les vignes adorent l’hiver


Un froid intense a le mérite de faire le ménage au niveau des champignons et des parasites. (photo Erwan Nonet)

Si un hiver rude comme celui-ci bloque de nombreux travailleurs qui œuvrent en extérieur, les vignerons, eux, gardent le sourire. Le froid limite la présence des champignons et des parasites et les vignes, sur ce sol gelé, restent facilement accessibles.

Ce début d’année, on n’apprend rien à personne, il fait froid. Voire très froid. «À Remich, les températures les plus basses se situent autour de -9, -9,5 °C, c’était les 4 et 23 janvier», précise Roby Mannes, du service Viticulture de l’Institut viti-vinicole. Mais s’il y a un corps de métier qui s’en félicite, c’est bien celui des vignerons. «Ça ne pose aucun problème, au contraire !», sourit Frank Schumacher (domaine Schumacher-Knepper, à Wintrange).

Parmi les classiques travaux d’hiver, il y a la taille. Mais les vignerons sont habitués à ces températures. «Quand il fait trop froid, nous travaillons à la cave, mais quand il fait beau et qu’il y a un peu de soleil, c’est du luxe de travailler dehors !», avance, enthousiaste, Laurent Kox (domaine Laurent et Rita Kox, à Remich). «Et s’il fait vraiment trop froid, on reporte, ajoute Frank Schumacher. Ce n’est pas grave, rien ne presse, puisque la plante est endormie.»

La sècheresse aussi, a du bon. «Dans ces conditions, on peut vraiment bien travailler, souligne Laurent Kox. Par exemple, le temps est idéal pour apporter de la matière organique avec le tracteur. Le sol est tellement dur que l’on peut rouler sans abîmer la terre.»

Outre le fait de rendre la circulation plus facile, le gel a aussi une heureuse action sur le sol. «L’alternance gel-dégel est chimiquement bénéfique pour les terres qui viennent d’être retournées», souligne Laurent Kox. «Nous avons replanté 30 ares de vignes sur les domaines de l’État et le gel permet de bien fractionner les gros blocs de terre, ajoute Roby Mannes. C’est une très bonne chose!»

Un froid intense a également le mérite de faire le ménage au niveau des champignons et des parasites. Mais est-ce à dire que par la grâce de cet hiver rude, les vignes seront saines toute l’année ? Ce serait trop beau. «On peut espérer que la population de Drosophila suzukii sera décimée (NDLR : la mouche du vinaigre qui pique les raisins pour y pondre ses œufs, les gâtant irrémédiablement), mais il ne faut pas attendre trop de miracles non plus…», temporise Roby Mannes.

En cave, pas de soucis pour les fermentations

Les températures négatives ne permettront pas non plus de venir à bout du mildiou, très présent l’an dernier. «Les spores sont très résistants : ils peuvent survivre pendant neuf ans, explique-t-il. C’est-à-dire que si des conditions favorables à leur prolifération surviennent lors de cette période, ils se développeront.» Il n’y a donc pas de corrélation à attendre entre un hiver froid et un printemps et un été sans aucune maladie.

En cave, le froid n’aura pratiquement pas d’incidence. Il ne reste que peu de cuves où la fermentation malolactique – qui se bloque en dessous de 12 °C – n’est pas achevée. Elles concernent en général les vins qui se transforment avec des levures indigènes et qui nécessitent donc davantage de temps. Dans le passé, sans doute que les fermentations de ces vins auraient été ralenties, mais aujourd’hui, la technique est là pour aider les vinificateurs. «Les cuves sont thermorégulées et un petit chauffage est suffisant pour remonter la température», précise Frank Schumacher. Une simple tige plongée dans la cuve et ne consommant que quelques watts suffit au maintien de la fermentation.

En outre, le froid a un effet bénéfique sur les vins dont la fermentation est achevée. «Il permet la précipitation de l’acide tartrique, qui se cristallise et tombe au fond de la cuve», explique Laurent Kox. De ce processus chimique découle logiquement un vin moins acide.

Le vigneron de Remich possède également deux kvevris enterrés dans son jardin. Il s’agit d’amphores de 800 litres à l’intérieur desquelles les vins issus de macération pelliculaire mûrissent pendant huit mois. Ces vins ont-ils gelé ? «Non, pour la bonne raison qu’elles sont vides cette année : je n’avais pas assez de vin après les petites vendanges !, sourit Laurent Kox. Mais normalement, la chaleur de la terre qui entoure l’amphore doit l’empêcher de geler. D’autant que le bouchon est réalisé dans une mousse isolante.»

Erwan Nonet

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