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Des chefs-d’œuvre se découvrent au Freeport


«Labours» (2006-2007), de Didier Marcel, est installé dans le grand hall d'entrée. Cette fausse terre contraste avec les murs de béton contemporains. (photo fabrizio pizzolante)

Picasso, Banksy… La zone franche Freeport organise une «porte entrouverte», dimanche, pour montrer au public des chefs-d’œuvre qui dorment toute l’année à l’abri des regards.

Les œuvres sont issues pour beaucoup de collections privées dont on ne connaît pas les propriétaires, laissant planer tous les fantasmes. Des fondations et musées comme le Mudam y entreposent également une partie de leurs collections et le musée luxembourgeois participe à l’événement.

Un premier passage sécurisé, un deuxième, vérification de l’identité, portique comme à l’aéroport, puis troisième passage sécurisé et nous voilà au cœur de ce qui ressemble à un bunker un peu futuriste. On ne s’attend pas à découvrir au milieu de ces murs de béton brut des chefs-d’œuvre de Picasso, Banksy ou Bernard van Orley (1488-1541).

L’exposition que propose le Freeport dimanche est pour le moins étonnante. Quelques-uns des chefs-d’œuvre cachés en coffre-fort toute l’année sortent de l’ombre une journée, selon la bonne volonté des propriétaires privés, fondations ou musées. L’aura du lieu, qui ne peut que susciter les fantasmes, donne une ambiance toute particulière à cette découverte.

Trente-quatre œuvres s’affichent sur les murs d’alcôves à peine plus grandes que les cellules d’une prison. De quoi provoquer un face-à-face très intime avec la toile, dans un cadre froid et neutre que seule l’œuvre réchauffe, comme celle de Banksy. Deux de ses œuvres sont présentées, dont Sharks (1999). Une peinture acrylique aux couleurs hypnotiques avec un message fort : des poissons tournent en rond dans un caddie encerclé par des requins. «C’était avant que Banksy ne découvre le pochoir et la rapidité d’exécution qu’il offre», indique Aymeric Thuault, qui est à la fois locataire d’un espace du lieu de stockage et représente des clients via le cabinet de conseil Link Management.

Face à Sharks, une œuvre très connue de l’artiste, Love Is in the Air (2003). Sur cette image souvent représentée en noir et blanc, le supposé manifestant lance à bout de bras un bouquet peint à la main par Banksy, rendant l’œuvre très précieuse. Rien que pour ces deux œuvres, cette exposition éphémère vaut le détour, mais il y a bien plus à découvrir.

Un Picasso traversé par la lumière

Le Mudam est l’un des musées qui stockent leurs acquisitions dans cette place forte. Dans ce cadre, il expose notamment des œuvres de Daniel Buren et Didier Marcel. «Nous voulions exposer différents types de médiums, c’est le point de départ», explique Marie-Noëlle Farcy, responsable de la collection. Le Mudam a pris le parti d’exploiter l’aspect «brut» du lieu à l’architecture très contemporaine en mettant au milieu du grand hall le Labours (2006-2007) de Didier Marcel. Comme son nom l’indique, l’œuvre contemporaine ressemble à un morceau de champ fraîchement labouré que l’on aurait soigneusement découpé pour le mettre au musée. Il s’agit en réalité d’élastomère teinté et d’acier inox poli résultant d’un moulage de terre.

La lumière derrière le Picasso, car oui, il y a un Picasso, qui a la particularité d’être en gemmail – une technique dans laquelle l’artiste superpose des fragments de verre – donne une grande profondeur au bleu de la robe de Dora Maar (1955-1960) ex-compagne de l’artiste. La lumière intensifie également les ombres de son visage, rendant le personnage mystérieux. Le gemmail passionna un temps Picasso et ses œuvres exécutées dans cette technique sont rares.

Dans d’autres salles, passé et futur, classique et contemporain se font face.

L’œuvre du Greco (1541-1614) El Salvador (portrait de Jésus-Christ), une prestigieuse toile religieuse, est à côté de l’œuvre de l’Allemand Jonas Burgert Suchter (2013) avec une scène «postapocalyptique. Il peint un théâtre d’hommes dont on ne comprend pas toujours ce qu’ils font», précise Aymeric Thuault. Dans le même espace, on peut également admirer Le Petit Saint Jean-Baptiste adorant l’enfant Jésus (vers 1515-1520) de Lucas Cranach l’Ancien, juste à côté du No de Santiago Sierra qui dénonce la religion.

À l’étage, les œuvres désarmantes de Philippe Perrin, un artiste français tourmenté. Lame de rasoir immense, poignard gigantesque planté dans le sol ou pistolet dans une plaque d’acier, l’artiste «magnifie des outils de violence inutiles et inoffensifs», indique Philippe d’Auvergne, administrateur délégué du Freeport.

Le public pourra aussi découvrir les œuvres de Rosson Crow, Andreas Gursky, Michel Majerus, Thomas Ruff ou encore Frank Stella. Un rendez-vous qui promet la découverte d’œuvres d’art surprenantes dans un lieu spectaculaire.

Audrey Libiez

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