Une quantité « impressionnante » d’armes, dont certaines de guerre, une tonne de munitions… Un véritable arsenal a été découvert chez quatre membres de la mouvance d’ultradroite lors d’un coup de filet en Alsace, même si aucun projet terroriste n’a pour l’heure été décelé.
Les quatre suspects, placés en garde à vue à l’issue de l’opération mardi, ont été mis en examen pour trafic d’armes, a indiqué vendredi lors d’une conférence de presse la procureure de la République de Mulhouse (Haut-Rhin), Edwige Roux-Morizot. Ils encourent 10 ans de prison. Deux d’entre eux ont été incarcérés, les deux autres laissés libres sous contrôle judiciaire, a-t-elle ajouté. La magistrate, qui avait demandé l’incarcération des quatre hommes, a indiqué qu’elle allait faire appel des deux placements sous contrôle judiciaire. Une cinquième personne, initialement visée par ce coup de filet, a finalement été laissée libre.
Les quatre hommes avaient été interpellés à leurs domiciles de Sierentz, Brinckheim, Richwiller et Mooslargue, des communes haut-rhinoises, lors de l’opération qui a mobilisé quelque 200 gendarmes. Il fallait « sécuriser les lieux » car les suspects étaient présumés « lourdement armés » et « entraînés au tir », a indiqué le colonel Alexandre Jeaunaux, commandant du groupement de gendarmerie du Haut-Rhin.
« Chasse aux Juifs »
« Toutes les précautions nécessaires ont été prises » pour que l’opération soit menée « en toute sécurité », ce qui a justifié la mobilisation du GIGN, a-t-il ajouté. L’opération a été déclenchée sur la base d’éléments des services de renseignement « très inquiétants » concernant « un groupuscule de l’ultradroite dite violente », dont certains membres auraient fait partie « d’une +chasse aux Juifs+ lors d’un match de football organisé à Strasbourg », a expliqué Mme Roux-Morizot, sans vouloir donner plus de précisions.
Les renseignements évoquaient également la possibilité qu’ils détiennent des armes, « dont certaines particulièrement dangereuses », a poursuivi la magistrate. Celle-ci a insisté sur « l’inquiétude » relative au « terrorisme d’ultradroite », désormais « assez prégnante ». A la demande de la préfecture, la justice a alors validé des « visites domiciliaires » aux domiciles des suspects qui se sont révélées « particulièrement fructueuses », avec une quantité d’armes « impressionnante » saisie dans les quatre domiciles, selon la procureure.
Dans le détail, 18 armes légales et 23 illégales ont été saisies, ainsi que 167 chargeurs dont 72 de Kalachnikov, a détaillé le lieutenant-colonel Yann Wanson, commandant en second de la section de recherche de Strasbourg. Plus de 35 kilos de poudre ont également été découverts, trois presses à munitions, un grand nombre de chargeurs d’armes de guerre, une machine à chauffer les douilles, une compteuse de billets, quatre balances de précision, plus de 25.000 euros et deux silencieux, a-t-il poursuivi. Les quantités de munitions sont « tellement énormes que nous parlons plutôt en termes de poids », a déclaré le lieutenant-colonel Wanson.
Cela représente « a minima 120.000 munitions de tous calibres, beaucoup destinées à des armes de guerre », pour un poids total de plus d’une tonne, a-t-il ajouté. Les suspects, âgés de 45 à 53 ans, présentent les profils banals de personnes « insérées » : « des citoyens comme les autres » en apparence, a résumé Mme Roux-Morizot.
« Tireur d’élite »
Ils appartiennent pourtant à un groupuscule néonazi, « ce qui a été totalement conforté par la littérature importante », négationniste et antisémite, retrouvée chez les suspects, qui affichent également dans leur intérieur plusieurs objets nazis, selon Mme Roux-Morizot et le lieutenant-colonel Wanson. L’un des suspects « pratiquait le tir à longue distance » en club « avec des stages de formation » de tireur d’élite, a encore noté l’officier supérieur.
« C’est le risque de les voir basculer vers le passage à l’acte qui a nécessité » l’intervention des autorités, a ajouté la procureure, même si aucun élément n’a pu pour l’instant étayer un quelconque projet concret. Des supports informatiques ont également été saisis, qui vont être analysés afin de déterminer si un projet d’attentat était fomenté.
« Quand on a des fusils d’assaut, une mitrailleuse, 30 kilos de poudre, de quoi fabriquer éventuellement des explosifs, (…) on se dit qu’on est peut-être arrivé tous à temps », a encore estimé Edwige Roux-Morizot.