Les paysages à couper le souffle, les nuits à la belle étoile mais aussi le manque, l’attente : Mathieu Nonnenmacher a voyagé durant deux ans autour du monde… en stop. Il revient sur cette aventure hors du commun.
C’était le 19 mai 2014. Mathieu Nonnenmacher, un jeune Uckangeois alors âgé de 25 ans, traçait la route en stop. Destination : le monde ! Avec comme simples bagages un sac à dos, une tente, un ordinateur portable et beaucoup, beaucoup d’envie. « C’était un rêve de gosse, et les choses ont fait que c’était le bon moment », résume-t-il simplement. Un départ, qui, outre les inquiétudes toutes naturelles des parents, s’est fait sans tambour ni trompette. À l’image de son retour en terre mosellane, pile vingt-cinq mois plus tard, le 19 juin dernier.
« C’était le jour de la fête des pères. Mes parents pensaient que j’étais au Canada… Je ne les avais pas prévenus. » Il n’aura finalement pris l’avion que pour traverser les océans.
Il y a encore quelques semaines, Mathieu dormait à la belle étoile avec vue sur Manhattan à New York, sillonnait le désert de sel d’Uyuni en Bolivie, décrochait un petit job en Australie, se promenait sous les arbres rouges des jardins de Kyoto au Japon, traversait des grottes sur un radeau en Thaïlande, escaladait un bunker à Vladivostok en Russie… Une expérience hors du commun qu’il minimise pourtant : « Il ne faut pas mettre mon voyage sur un piédestal. Tout le monde peut le faire, il suffit de le vouloir. »
De la débrouille
Pour le faire justement, Mathieu avait mis quelque 10 000 euros de côté. Il en a finalement presque dépensé le triple. « Pour m’en sortir, j’ai vendu quelques photos, j’ai travaillé… » De la débrouille. À l’instar des nuits passées sous la tente, dans les squats, sur les canapés d’inconnus ou dans les auberges de jeunesse. Les heures d’auto-stop, parfois jusqu’à 26 heures d’affilée comme en Patagonie. Les cinq jours à attendre en vain un bateau pour l’Antarctique, à la veille de Noël, qui ne viendrait finalement jamais. Sans parler de la fois où il a échappé de justesse à la police, alors qu’il grimpait un pont à Manhattan. Rien de bien méchant selon lui.
« Ce qui m’a le plus manqué, c’était de parler à des connaissances. Je rencontrais des gens tous les jours, mais ce n’est pas pareil, nous n’avions pas de passé commun. » Une absence plus douloureuse encore après les attentats de Charlie et ceux du 13 novembre : « C’était vraiment bizarre. J’ai appris ça à Hong Kong et Auckland. Ne pas être là, ne pas partager l’élan de solidarité… J’avais envie de rentrer en France. Mais en transit, tu suis l’actu avec un peu plus de détachement. Tu ne t’y attardes pas. »
Mathieu est revenu en Lorraine avec des souvenirs plein la tête. Bien qu’il ne soit pas certain de ne pas avoir laissé un peu de lui sur tous les continents : « Je suis resté le même globalement, mais des choses ont changé. Je n’ai pas le recul pour savoir quoi, mais ce voyage a eu un impact sur moi. Sur l’écologie, sur ma vision du monde. » Une vision qu’il s’efforcera peut-être de retranscrire dans un livre de photos. Avant de se lancer dans de nouveaux projets, de nouveaux voyages à plus ou moins long terme. Mais toujours seul : « Le voyage, c’est quelque chose d’égoïste pour moi », conclut-il…
Damien Golini (Le Républicain Lorrain)