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Près de Thionville : 40 ans que les voitures se plantent dans leur jardin


Abattus, au bord de la résignation : un calvaire qui dure pour Alain et Josiane, aujourd’hui retraités. (photo RL)

Cela fait quarante ans que les accidents défrayent la chronique, juste devant leur propriété, à Kédange-sur-Canner. Toujours des sorties de route, qui finissent sur leur terrain. Ils en comptent près de 30 en tout ! Les époux Sommen n’en peuvent plus.

Dans l’intimité de leur salon, les époux Sommen ressortent un dossier qu’ils n’auraient jamais voulu ouvrir, épaissi par de nombreux extraits de journaux issus de la rubrique faits divers. Point commun de toutes ces coupures soigneusement consignées : leur pavillon arboré des années 1970, qui a été encore dernièrement le théâtre d’accidents de la route.

Un premier article faisant état d’un sinistre dans le virage de Kédange-sur-Canner, devant chez eux, puis un deuxième, un troisième… « Là, c’était en 1984, j’étais enceinte. Une voiture s’est retrouvée dans notre jardin, sur le toit. »

Cette année-là, on recense trois morts et un accident par mois sur ce tronçon de départementale, qui voit alors passer 7 000 véhicules par jour. L’inventaire à la Prévert mentionne également des camions retournés, bloquant le trafic durant des heures. Puis le décès du fils d’un adjoint au maire fauché par une voiture. Et ces deux chauffeurs poids lourd espagnols transportant 20 tonnes de truites, broyés dans leur cabine.

« C’est notre vie qui est en danger »

Depuis que le sculpteur marbrier et l’agent du Trésor public habitent cette maison, en 1973, la famille déplore presque une trentaine de sorties de route qui ont fini sur leur terrain, après avoir, à chaque fois, détruit leur muret en béton et granit. Heureusement, sans les toucher corporellement.

« Ça suffit !, s’emporte Alain Sommen. Je n’en peux plus, mon épouse aussi, elle est plus choquée que moi… Encore mercredi dernier, elle a vu de près le vingt-huitième véhicule venir percuter le mur qui clôt ma propriété devant cette sacrée D918. En trois jours, trois berlines ont traversé le trottoir et mon parking pour fracasser le muret et se retrouver dans le gazon ou devant ma porte d’entrée… C’est notre vie qui est en danger quand on sort ou quand je tonds ma pelouse. » Les piliers en blocs de granit sont projetés quelques fois à plus de 4 mètres…

Un calvaire qui dure pour Alain et Josiane, aujourd’hui retraités. On les sent abattus, au bord de la résignation, car lassés de « l’impression » d’immobilisme des personnes alertées sur la situation. Une colère froide ponctue leur quotidien, car ils se sentent toujours « perdants ».

« À chaque fois, c’est le même refrain, témoigne le père de famille. Les gens nous disent « Je roulais à 50 km/h, la chaussée était glissante », ou « un camion m’a forcé de me déporter vers la droite » Sans compter ces indélicats, ces fuyards qui ne laissent pas d’adresse mais laissent la note des réparations au couple sinistré.

La question du dédommagement

Et Alain d’appuyer : « Je vois la vitesse et l’inconscience de certains chaque jour. J’ai lancé une pétition qui n’a pas abouti. Il faut casser la vitesse. Le maire vient de lancer un diagnostic sur la D918. » Alain et sa femme espèrent une solution rapide. Car ces accidents à répétition leur coûtent cher. Moralement et financièrement. « Un jour, ma voiture et celle de mon fils ont été percutées et très endommagées. L’expert m’a donné 2 000 euros ! » Sans compter son ras-le-bol des paperasses et des reconstructions du muret.

« Un contournement a été réalisé à Stuckange, pourquoi pas à Kédange, où le trafic est encore plus dense ? », questionne le propriétaire des lieux. Un tel projet date des années 1930… repris par le député Aubron qui le demandait en 2002 au président du conseil général Philippe Leroy.

« Tous ces faits divers, c’était hier, ça continue aujourd’hui, mais ça doit cesser demain ! », soufflent les époux Sommen.

Emmanuel Correia/Fernand Belner (Le Républicain Lorrain)