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Masseret, l’irréductible Lorrain


Seul contre tous, Jean-Pierre Masseret se dit "meurtri", mais "digne". (Photo AFP)

« Têtu et obstiné » ou « homme de valeurs » ? En une soirée, Jean-Pierre Masseret, 71 ans, tête de liste PS aux régionales dans l’Est, est devenu l’irréductible Lorrain qui brave la rue de Solférino en refusant de se retirer face au Front national.

Quelques minutes après 20 heures dimanche, malgré son score désastreux -16,11%, le plus mauvais de toutes les listes régionales PS ce soir-là- et 20 points d’écart avec le candidat frontiste Florian Philippot, ce septuagénaire à l’éternel col-roulé annonçait son maintien en Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine. Il court-circuitait du même coup les annonces imminentes de Paris, où les dirigeants socialistes, réunis en bureau national, décidaient du retrait en cas de triangulaires défavorables.

« Pas de retrait pour moi », a maintenu le président sortant du Conseil régional de Lorraine. Et tant pis si les pressions se multiplient, comme les appels sur son téléphone portable. Au point qu’il est possible qu’il en ait raté un ou deux du premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, glisse-t-on dans son entourage.

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Mais rien ne semblait pouvoir le faire changer d’avis : ni les SMS de Manuel Valls lundi matin -« Tu ne peux pas avoir raison seul contre tous »-, ni ce qui ressemblait à une mise au pilori par son ami « Manu » en direct sur France 2 le soir même : « Il ne faut pas s’accrocher, il faut être digne ».

« Je suis désolé, mais il y a des choses que je ne peux pas faire », rétorque Jean-Pierre Masseret. Rien à voir avec une éventuelle peur de la retraite : « Je porte la défense d’intérêts, je ne m’accroche pas à un poste ». Cet homme « têtu et obstiné, avec un sens politique affiné », selon Jean-Michel Toulouze, un des candidats aux régionales souhaitant ardemment son retrait, se dit incapable d’imaginer une assemblée régionale sans élus de gauche pendant six ans.

« Meurtri » mais « digne » 

Tout ça le touche : il s’avoue « meurtri » de la situation. Derrière ses lunettes rondes, ses yeux bleus fatigués trahissent les nuits courtes et les discussions longues. « Vous imaginez bien que pour moi c’est extrêmement difficile d’être dans cette situation d’espèce de confrontation avec mon propre parti », lançait-il lundi soir à la télévision. Et de se défendre face aux accusations du Premier ministre : « Je suis un homme digne, je suis un homme engagé, je suis un homme qui croit à ses valeurs et aux engagements qu’il a pris ».

Ce marathonien de longue date, qui a même remporté celui de Paris dans la catégorie vétérans, n’envisage pas une élection autrement que « jusqu’au bout ». « On est candidat pour être élu, de la majorité ou de l’opposition », explique-t-il en assurant se projeter « dans un moyen terme, dans le combat contre le Front national », que la stratégie d’évitement ou de front républicain n’a jamais permis de gagner. « Quand on fait une analyse froide de la situation, il a raison », reconnaît Jean-Michel Toulouze, qui estime cependant que « son logiciel ne fonctionne plus ».

A la Région depuis trente ans

Marié, trois enfants et deux petits-enfants, il est né à Cusset, dans l’Allier. Mais c’est à la Lorraine que cet homme, qui n’a jamais caché son appartenance à la franc-maçonnerie, doit toute sa carrière politique.

L’ancien inspecteur des impôts a décroché son premier mandat en 1979 au conseil général de Moselle -observant, élection après élection, la poussée du parti d’extrême droite.

Élu sénateur de Moselle en 1983, il n’a quitté les bancs du palais du Luxembourg qu’une fois, entre 1997 et 2001, le temps d’enfiler le costume de secrétaire d’État aux Anciens combattants sous le gouvernement Lionel Jospin. A ce poste, il a tout fait pour que la guerre d’Algérie soit reconnue en tant que telle. « Permettez-moi d’utiliser l’expression guerre d’Algérie, je sais bien que c’était une guerre, tout simplement », avait-il lancé en inaugurant un mémorial -rompant avec l’utilisation du pudique « événements ».

Quant au conseil régional de Lorraine, il y est entré en 1986 et en a arraché la présidence à la droite en 2004, porté par la « vague rose ». A l’issue, déjà, d’une triangulaire avec l’UMP et le Front national.

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