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Hayange/Cattenom : les véganes passent à l’attaque


Alexandre Dellarovere, patron-boucher à Hayange, devant sa devanture vandalisée par des véganes. (Photo : Le Républicain Lorrain/Julio Pelaez)

Les deux boucheries mosellanes taguées fin juillet, à Cattenom et Hayange, traduisent une radicalisation des défenseurs de la cause animale, adeptes d’actions qui frappent les esprits. «Celles qui installent un rapport de force.» Ils s’expliquent.

Au petit matin, ils ont enragé en découvrant la devanture de leur boucherie esquintée ou taguée à la peinture blanche. Des photos d’animaux en souffrance et de visages humains dans une barquette de viande, envoyées plus tard sur le portable d’un des professionnels mosellans, ont créé le malaise. Les messages portent la marque des antispécistes, opposés à toute hiérarchie entre les espèces, une idéologie qui défend le droit animal et la fin d’un système exploiteur.

Ce qui s’est passé à Hayange et Cattenom, le 20 juillet, a eu lieu ailleurs. Une poissonnerie parisienne a été touchée récemment. Il y a un an, c’est la fête du Cochon qui a été perturbée à Hayange. Pendant que le véganisme apparaît comme un filon économique de plus en plus porteur, la lutte pour la cause animale se radicalise. La seule issue?

«Ces actions contre des boucheries, ce n’est pas ce qu’on prône, assure Tiphaine Lagarde, coprésidente et porte-parole de l’association «269 Life Libération animale». L’exploitation est un système. Viser un petit boucher, c’est s’attaquer à une personne.» La Messine d’origine et son organisation ne sont pas derrière ces attaques nocturnes. «Mais ça ne me dérange pas, évidemment… On comprend que des personnes finissent par lancer ce genre d’actions.»

«Cela montre que l’on dérange»

269 Life Libération animale croit à la lutte et à l’action directe. Celle qui fait parler. Celle qui permet «d’installer un rapport de force avec l’État et les entreprises», décrypte Ceylan Cirik, l’autre fondateur de l’association. «Façon suffragette», prolonge Tiphaine Lagarde. Comme ce groupe de femmes qui a beaucoup œuvré pour le droit de vote des femmes au Royaume-Uni, au début du XXe siècle, elle croit à la lutte politique, même risquée et pleine de sacrifices.

Face à l’industrie agroalimentaire, les deux activistes se sont lancés dans un bras de fer à coup d’opérations coup de poing et d’occupation d’abattoirs. «On a commencé par des manifestations légales et ça n’intéressait personne. Maintenant, on bloque des chaînes d’abattoirs, nous sommes visés par des poursuites judiciaires et condamnés… Cela montre que l’on dérange.» Entendre le monde de l’agroalimentaire se plaindre de leurs actions, lors de discussions sur le bien-être animal, est pour eux un encouragement. Pas encore un accomplissement. «On n’a pas renversé le système», mais leurs arguments se diffusent. Les Français mangent moins de viande.

«De nouvelles personnes, un nouveau public nous rejoignent. Nous avons pu faire des conférences lors du blocage des universités. Lorsqu’on leur montre que notre mouvement est un combat social, ça les intéresse. Ça les amène à s’interroger. Certains pensaient que c’était un combat de seconde zone…» «Ces jeunes gens, qui ont déjà la culture de la lutte, se rendent compte qu’on est en réalité dans une vraie lutte politique, intervient Ceylan Cirik. Ça nous rend crédibles.» Et, eux, promettent-ils, ça les rend «plus forts».

Kevin Grethen (Le Républicain lorrain)