De l’enfer au purgatoire. Moins de transports, moins de stress et pour certains, même, plus de productivité. De l’aveu de nombreux frontaliers, le télétravail a redonné du sens à leur vie. Sous couvert d’anonymat, ils témoignent de ce renouveau qu’ils souhaitent voir s’inscrire dans la durée.
«J’ai honte, parfois, de penser ça. Je ne devrais pas le dire, mais le Covid-19 a changé ma vie. Dans le bon sens.» Non, Léa, plus d’une décennie de besogne frontalière au compteur, ne se réjouit pas du malheur des autres. Ces derniers mois, elle a simplement retrouvé goût à la vie. Cette mère de deux enfants redécouvre le bonheur simple du petit-déjeuner familial en semaine. Ou encore du délicat apprentissage de la lecture pour sa petite dernière.
Le télétravail a mis fin à un contre-la-montre perpétuel, «pour prendre le train, à l’heure, puis le bus, à l’heure, enfin, chercher les enfants, à l’heure», qui, à force, l’avait déshumanisée : «J’étais dans un tunnel. À la longue, ces trois heures de trajet quotidien, c’était devenu la norme. Comme se coucher à 21 h. Physiquement, ton corps s’habitue. Il tient. Tu ne te poses plus de question. Après presque trois mois de trêve avec le bureau, je me les pose, aujourd’hui, les bonnes questions.»
«Plus réactive qu’au bureau»
«Il a fallu une pandémie mondiale pour découvrir que le télétravail n’était pas un écueil. Mieux, au lieu de s’interroger sur la création d’une troisième voie sur l’autoroute ou sur un nouveau cadencement des trains, on sait désormais que pour désengorger le trafic , c’est ça la voie.» Céline, presque la quarantaine, officie dans un cabinet d’audit appartenant au fameux «Big Four». Cette habitante de l’agglomération thionvilloise a, elle aussi, pris goût au travail à distance.
Un confort personnel qui n’entrave en rien sa productivité : «Au contraire, même. Lors d’un « call » avec mon manager, celui-ci m’a dit que j’étais plus réactive qu’au bureau…» Le supérieur hiérarchique loue également son assiduité : «Je n’ai aucun problème à faire du rab. Quand tu n’as plus la boule au ventre à l’idée de louper ton train de 17 h 30, tu acceptes volontiers d’allonger tes journées de travail.»
«Foutue A31»
«Il n’aura fallu qu’une seule journée pour que je rechute…» Le trust bancaire qui emploie Jérôme lui impose de revenir sur site une fois par semaine jusqu’au mois de septembre. Un deal plus qu’acceptable mais qui a réveillé bien des démons : «J’avais oublié cette foutue A31 ! La première fois que j’ai repris l’autoroute, c’est comme si tous les éléments s’étaient ligués contre moi.»
Des averses. Un trafic à l’arrêt. Un carton impliquant plusieurs véhicules. Et le volume sonore de la radio augmenté pour s’évader : «La triste routine… Je ne la veux plus. Elle ne sert à rien, d’ailleurs. Je n’ai pas de contact avec la clientèle. Ce que je fais au bureau, je peux le faire de chez moi. Et même en…» mieux. «J’espère que le télétravail va se généraliser à la rentrée», conclut Léa. De là à espérer une deuxième vague de Covid-19 ? «Bien sûr que non… J’ai suffisamment honte comme ça.»
Jean-Michel Cavalli (Le Républicain lorrain)
Longwy c’est pourri mais on a pas l’A31! 😉 J’ai déménagé de Thionville à Longwy et maintenant je mets 35 min en train, y’a personne dans les wagons on peut même s’allonger! 😉