Le dossier de l’A31 va bouger lundi, avec le séminaire franco-luxembourgeois. Si péage il y a, le conseiller régional Édouard Jacque veut qu’il soit bien placé…
Des bruits courent sur un éventuel cofinancement de l’A31 bis entre la France et le Luxembourg, à l’approche du séminaire de Paris des 19 et 20 mars. Quoi qu’il en soit, si la solution d’un soutien privé est maintenue, donc d’un péage, les élus du bassin de Longwy alertent sur le risque du déport du flux sur leur territoire, ainsi que sur Pétange et Athus. Édouard Jacque, ancien maire de Longwy et conseiller régional du Grand Est, explique pourquoi le projet doit être considéré de façon plus globale.
Avec une A31 bis payante sur le tronçon Thionville-Luxembourg, craignez-vous une saturation du bassin de Longwy ?
Édouard Jacque : Pas seulement : les arrondissements d’Aubange et de Messancy, Pétange ou encore le versant meusien de Longuyon paieront les pots cassés aussi! Pourquoi voudriez-vous que les poids lourds qui viennent d’Europe du Nord reprennent l’autoroute vers Thionville, une fois qu’ils auront fait le plein au Luxembourg ? C’est payant? O. K., donc je poursuis par la RN52, l’A30 ou encore même la nationale 18 pour rejoindre Metz et rouler vers le Sud… Voilà comment les poids lourds raisonneront, implacablement. Toute une partie du flux sera détournée.
D’autres responsables politiques font-ils le même constat que vous ?
Bien sûr. Des élus de l’agglomération de Longwy ont organisé une réunion sur le sujet, avec nos amis belges d’Aubange. Ils sont directement concernés, ils ont conscience de ce qui nous attend si nous ne bougeons pas.
Paradoxalement, vous n’êtes pas contre l’idée d’un péage ?
Évidemment, non. Il faut prendre un peu de hauteur sur le sujet. Que font les Suisses avec leur réseau routier ? Payant. Quel est l’un des points importants de l’accord de la coalition allemande CDU-CSU ? Des péages sur les autoroutes. En France, l’État peine à développer le réseau routier dont il est propriétaire, et c’est logique car c’est coûteux. Il faut des sources de financement externes si nous voulons avancer.
Où mettre ce péage en Lorraine alors ?
Au sud de Toul, à mon sens (NDLR : donc au sud de Nancy). Il faut prendre en compte tout le « Y » routier de la frontière : l’A30 (vers Longwy et la Belgique) et l’A31 (vers Thionville et Bettembourg). Si on met un péage sans contact ou une vignette obligatoire à partir de Toul, on ne pénalise pas les voyageurs de la Grande Région « intra-muros » : ni le frontalier, ni le livreur sur petits trajets, ni le tourisme local.
On vise en fait essentiellement les camions ? Sachant que la logistique se démultiplie dans la Grande Région (NDLR : 100 000 m² d’entrepôts prévus à Bettembourg, en plus de la nouvelle plateforme CFL). Tous les conteneurs n’iront pas sur le rail… La logistique est importante dans toute la Grande Région, je regarde avant tout les chiffres de fréquentation de nos autoroutes. Les poids lourds représentent une part importante du trafic actuel sur l’A30 et l’A31… pas loin de la moitié des flux lors de certaines périodes ! Ça me paraît logique de se pencher sur la question, et que les utilisateurs, dont les camions, participent au financement. Le président du conseil départemental de Meurthe-et-Moselle, Mathieu Klein, a d’ailleurs proposé une forme d’écotaxe pour financer l’A31 bis. Notre démarche est similaire. Mais les élus du Pays-Haut veulent que l’on raisonne en termes d’A31, A30 et tout le réseau local.
L’État français pourrait-il gagner assez d’argent pour financer une A31 bis avec ce système ?
Bien entendu! L’A31 est l’une des autoroutes les plus fréquentées d’Europe. Il y a une cagnotte à la clé. J’insiste d’ailleurs : les sommes ne devront pas servir qu’à bâtir l’A31 bis. La cagnotte doit permettre aussi de financer des projets de mobilité par le train (nouvelles rames, RER Nancy-Luxembourg, etc.), le monorail (Thionville-Luxembourg) ou même le réseau cyclable à la frontière.
Entretien avec Hubert Gamelon