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Circonscription de Thionville-Est : le face-à-face entre Isabelle Rauch et Émilie Matz


Isabelle Rauch et Émilie Matz ont débattu sur la terrasse du Concorde à Thionville. Au 14 e étage, elles avaient une vue panoramique sur la circonscription. (photo Pierre Heckler / RL)

À quelques jours du deuxième tour des législatives en France, nos confrères du Républicain lorrain ont invité les deux candidates qualifiées dans la neuvième circonscription de la Moselle (Thionville-Est) à prendre un peu de hauteur. Isabelle Rauch (LREM) et Émilie Matz (FN) ont confronté leurs points de vue, y compris sur le sujet des frontaliers. En toute courtoisie.

Emilie Matz, vous avez 23 points de retard sur Isabelle Rauch et des réserves de voix limitées. Vous espérez encore l’emporter ?

Émilie Matz. « Évidemment. Je sais que ce sera très difficile mais nous allons tout faire cette semaine, sur le terrain, pour diminuer l’écart et pourquoi pas rattraper Isabelle Rauch. »

Vous faites campagne avec quel message pour ce second tour ?

Émilie Matz. « J’invite les électeurs à voter pour le seul parti d’opposition face à Macron. C’est dimanche que ça se joue. Dans quelques mois, quand il aura mis en œuvre son programme, ce sera trop tard. »

Et vous Isabelle Rauch, vous éprouvez encore le besoin de faire campagne, avec une telle avance ?

Isabelle Rauch. « Moi, je suis une femme de terrain. Et il n’y a rien qui me motive plus que le contact avec les électeurs. Je prends énormément de plaisir dans cette campagne. Donc je donnerai tout, jusqu’au bout, avec mes équipes. »

En quoi seriez-vous une meilleure députée que votre adversaire ?

Isabelle Rauch. « Je laisse aux électeurs le soin d’en juger mais je sais que je serai une bonne députée. J’ai un ancrage local, je connais bien la circonscription et ses enjeux. À la différence d’Émilie Matz, je suis aussi la candidate qui porte un projet présidentiel crédible. Il donne la feuille de route de ce que vont être les cinq prochaines années. »

Émilie Matz, c’est ce projet présidentiel que vous combattez ou c’est la candidate Isabelle Rauch ?

Émilie Matz. « Je ne combats pas la personne mais le projet qu’elle porte. Je propose aux électeurs de choisir une députée capable de s’opposer à Emmanuel Macron, de les représenter en faisant passer leurs intérêts avant le reste. Vous savez, ma présence au second tour a été une grande surprise pour tout le monde. Si le Front national a réussi à se hisser à ce niveau, c’est que les électeurs attendent un vrai changement. »

Isabelle Rauch. « C’est vrai, ils attendent un changement, mais pas le repli sur soi que propose le Front national. Ils ont surtout exprimé leur adhésion à la recomposition que propose Emmanuel Macron. J’ai fait un score bien supérieur à celui du président de la République au premier tour. Cela prouve que les électeurs ont été séduits par le début du quinquennat et la composition du gouvernement. Avec des femmes et des hommes de gauche, de droite et de la société civile qui travaillent ensemble pour un projet. Je suis élue depuis seize ans et cela fait seize ans que j’entends les électeurs réclamer cette configuration. Le vrai changement, c’est celui-là. »

Et vous, vous faites campagne contre le FN ou contre sa représentante ?

Isabelle Rauch. « Moi je fais campagne pour. Pour un projet, pour le rassemblement, pour le changement. Je dis aussi que la circonscription aurait beaucoup à gagner à avoir un député de la majorité. »

Pourquoi ?

Isabelle Rauch. « Parce que pour faire bouger les choses, il faut être missionné. Pour travailler sur les questions transfrontalières par exemple, il faut un ordre de mission du Quai d’Orsay. Soyons objectifs : seuls les députés de la majorité ont ces accès privilégiés. »

Émilie Matz. « Être dans l’opposition, ce n’est pas un handicap. On est dans l’opposition parce qu’on a des convictions et des idées à défendre. C’est indispensable en démocratie. S’il faut absolument être dans la majorité pour pouvoir travailler, alors tous ceux qui ne sont pas d’accord avec Macron devraient rester à la maison les bras croisés. C’est justement parce que je ne supporte pas cette idée que je me suis engagée en politique. »

En tant que députée, avez-vous l’intention de respecter une stricte discipline de parti ?

Isabelle Rauch. « J’ai toujours respecté la discipline de parti. En revanche, il y a des espaces de débats dans un groupe politique : dans les réunions préparatoires, les commissions. On peut faire valoir son point de vue, son expertise et faire bouger les lignes. Mais lorsque le vote arrive, il faut rester unis car c’est la stabilité du groupe qui est en jeu. C’est toujours ainsi que j’ai travaillé, que ce soit à la mairie de Thionville ou au conseil départemental. On peut faire avancer les choses autrement que par les coups d’éclat. »

Émilie Matz. « Moi je n’ai pas l’intention de faire de l’opposition systématique. Si le gouvernement présente un projet positif pour les Français, je le voterai sans aucun problème, même si le parti me demande de faire le contraire. En revanche, je serai là quand il faudra s’opposer, au nom de la défense des intérêts des Français. Chaque texte de loi doit être examiné au cas par cas. »

Le problème numéro un de cette circonscription, c’est la galère des frontaliers qui vont travailler au Luxembourg tous les jours. L’autoroute est saturée, les trains sont bondés et les bus disparaissent. Concrètement, que ferez-vous pour eux ?

Émilie Matz. « Je ferai forcément mieux que les politiques en place jusqu’à aujourd’hui. Ils ont tous reconnu qu’il y avait un problème. Mais ils n’ont rien fait pour trouver une solution ! C’est un immense échec pour eux. La solution doit être trouvée avec le Luxembourg. Je veux le redire : au Front national, nous ne sommes pas contre l’Europe, nous voulons simplement une Europe différente. Et nous sommes prêts à trouver des solutions avec les Luxembourgeois. »

Isabelle Rauch. « Le député devra être le facilitateur, celui qui sera chargé d’organiser la concertation pour la recherche de solutions. Son job sera de réunir autour de la table tous les acteurs, de différents pays et de différentes sensibilités. »

Et quelles solutions proposez-vous ?

Isabelle Rauch. « À court terme, il faut déjà réduire les flux, en relocalisant sur notre territoire des emplois qui seraient utiles à l’économie luxembourgeoise. Cela passe notamment par le télétravail. Pour cela, il faut mettre en place des expérimentations fiscales qui sont possibles au regard de la loi. Au député de s’emparer de ce dossier et je m’y engage. À moyen terme et à long terme, il faut évidemment travailler sur les infrastructures, notamment sur le ferroviaire afin de soulager la route. »

L’État devra rendre des arbitrages définitifs sur le projet d’A31 bis au cours de la prochaine mandature. Êtes-vous favorable à ce projet, au plan technique comme au plan financier ?

Isabelle Rauch. « Sur le volet financier, c’est inacceptable en l’état. Je me battrai pour qu’il n’y ait pas de péage pour les usagers de notre territoire.»

Émilie Matz. « Le péage, c’est non. »

Vous vivez les dernières heures d’une campagne intense. Que retenez-vous des échanges que vous avez eus avec la population ?

Isabelle Rauch. « J’ai ressenti une grande attente. Une envie que ce gouvernement réussisse. Et pour le prochain député, ce sera une grande responsabilité. »

Émilie Matz. « Moi j’ai senti une fracture entre l’urbain et le rural. Dans certains villages, à quelques minutes de Thionville, les gens m’ont dit leur ras-le-bol de ne pas avoir de réseau téléphonique ou de haut débit. Ils se sentent oubliés, abandonnés. Ils ont besoin d’élus qui pensent à eux. »

Anthony Villeneuve (Le Républicain lorrain)

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