Trois associations environnementales et Contre le nucléaire citent EDF devant le tribunal de Thionville pour non-déclaration immédiate d’un incident survenu au cœur des réacteurs à la centrale de Cattenom en décembre 2011.
La prévenue s’appelle EDF. L’entreprise était citée hier devant le tribunal correctionnel de Thionville par trois associations pour non-déclaration immédiate d’un incident au sein de sa centrale nucléaire à Cattenom.
Le 21 décembre 2011, un contrôle interne de sûreté, ordonné suite à la catastrophe de Fukushima, révèle un défaut d’installation au niveau de deux réacteurs. Plus précisément, le diagnostic pointe l’absence de casse-siphons : des orifices au niveau de la tuyauterie présente dans les piscines de stockage où sont plongés les combustibles usagés ou non. En clair, il s’agit d’un système évitant que l’eau ne se vide et que l’uranium ne soit laissé à l’air libre.
« C’est un élément accessoire, complémentaire à d’autres systèmes d’alarme », minimise le représentant juridique d’EDF. L’anomalie n’a été signifiée à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) que le 13 janvier 2012, cinq jours avant une déclaration officielle en bonne et due forme. Des délais beaucoup trop longs selon les trois associations qui dénoncent les faits (Réseau sortir du nucléaire, France nature environnement et Mirabel Lorraine nature environnement).
L’ASN juge également les modalités de déclarations insatisfaisantes. Deux inspecteurs présents à l’audience hier ont rappelé que cet « écart de conformité » signalé à Cattenom se classe au niveau 2 sur une échelle qui en mesure l’importance. « Fukushima, c’est 7. »
Décision le 15 décembre
« Nous étions face à quelque chose d’inédit. Il a fallu déterminer l’ampleur de l’événement pour apporter des informations complètes », se défend EDF. Les 58 réacteurs français ont été examinés. Seul le site de Cattenom était concerné. Et cela fait 28 ans, depuis la construction de la centrale, que les réacteurs 2 et 3 fonctionnaient sans casse-siphons. « C’est un défaut. Mais à aucun moment, la sûreté nucléaire n’a été mise en cause », persiste le représentant juridique d’EDF à la barre du tribunal. « L’anomalie de construction » a finalement été mise en conformité début février 2012 dans cette zone contrôlée, dont l’accès est strictement réglementé.
« C’est un événement grave, inquiétant qui s’est produit au cœur radioactif de la centrale », appuie l’avocat des associations, Me Ambroselli, réclamant notamment 5 000€ de dédommagement pour chacune d’entre elles. Pour lui, la déclaration tardive de l’incident est bien le point clé du dossier. Sauf que selon son contradicteur, Me Piquemal, il ne s’agit pas d’un incident mais d’une défaillance technique antérieure à l’exploitation. « Les délais reprochés s’appliquent-ils à la situation ? », s’interroge-t-il. Selon lui, la réponse est dans le guide de réglementation de l’ASN : « Le délai de déclaration est fluctuant en fonction de l’urgence et de la difficulté plus ou moins grande de la situation », soutient l’avocat de la défense qui plaide la relaxe d’EDF.
Le jugement sera rendu le 15 décembre.
Frédérique Thisse (Le Républicain Lorrain)