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Affaire Grégory : la garde à vue de Murielle Bolle en 1984 annulée


La justice estime que la garde à vue de l'adolescente avait été effectuée en application de dispositions "inconstitutionnelles". (archives AFP)

Près de 36 ans après la mort de Grégory Villemin, la justice a annulé jeudi la garde à vue de Murielle Bolle mais maintenu ses déclarations devant les gendarmes et le juge dans lesquelles elle accusait son beau-frère Bernard Laroche d’avoir enlevé le garçonnet.

Placée en garde à vue quelques jours après la découverte du corps de Grégory Villemin le 16 octobre 1984 dans la Vologne, Murielle Bolle, alors âgée de 15 ans, avait accusé Bernard Laroche d’avoir kidnappé le garçon de 4 ans, dont le meurtre reste une des plus retentissantes énigmes judiciaires en France. L’adolescente avait ensuite répété ses propos devant le juge d’instruction Jean-Michel Lambert, avant de se rétracter en dénonçant la pression des gendarmes.

Aujourd’hui encore, cette volte-face reste au cœur de l’enquête. Murielle Bolle n’a depuis cessé de clamer l’innocence de Bernard Laroche, qui sera abattu par le père du « petit Grégory », Jean-Marie Villemin, en 1985.

Elle en a « marre » et veut « qu’on la laisse tranquille »

Si elle a invalidé jeudi la garde à vue et quelques autres pièces du dossier, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris n’a en revanche pas annulé les déclarations de Murielle Bolle faites auparavant aux gendarmes, ni son interrogatoire ultérieur devant le juge Lambert, a-t-on appris de source judiciaire. En février, la Cour de cassation avait ouvert la voie à cette annulation, estimant que la garde à vue de l’adolescente avait été effectuée en application de dispositions « inconstitutionnelles » de l’ordonnance de 1945 sur « l’enfance délinquante », la loi ne prévoyant alors, par exemple, ni présence d’un avocat ni notification du droit de se taire.

La plus haute juridiction judiciaire, qui entérinait une décision du Conseil constitutionnel rendue quelques mois plus tôt, avait dès lors renvoyé devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris cette partie du dossier. « Globalement, nous sommes satisfaits de la décision qui a été rendue », a déclaré à des journalistes Me Jean-Paul Teissonnière, avocat de Murielle Bolle. « Les quelques déclarations de Murielle qui subsistent n’ont pas beaucoup d’importance car plus personne ne soutient que ce qu’elle a déclaré correspond à la réalité », a-t-il affirmé, soulignant que sa cliente en avait « marre » et « souhaiterait qu’on la laisse tranquille ».

L’enquête va désormais se poursuivre à Dijon, a déclaré le procureur général de la Cour d’appel de Dijon Jean-Jacques Bosc, qui s’est félicité du maintien dans le dossier de certaines déclarations de Mme Bolle. « C’est un élément important, ça préserve des pièces importantes », a-t-il dit.

Les avocats des parents satisfaits malgré tout

L’avocat des parents de Grégory Villemin, Me François Saint-Pierre, s’est lui aussi réjoui « que l’enquête puisse se poursuivre ». « La cour d’appel n’a annulé que les déclarations de Murielle Bolle tenues en garde à vue et maintenu au dossier celles qu’elle avait tenus avant cette garde à vue », a poursuivi l’avocat. « Or, dans cette audition de témoin assisté, Murielle Bolle a livré aux gendarmes l’intégralité du récit de l’enlèvement de Grégory par Bernard Laroche, c’est l’essentiel ». « Pas mal d’investigations ont été faites et restent à faire, qui devraient permettre une issue intéressante à ce dossier », a de son côté estimé Me Thierry Moser, autre avocat des époux Villemin. « Je pense qu’il y a encore au moins une bonne année de travail ».

En revanche, pour Me Gérard Weltzer, avocat de Marie-Ange Laroche, sœur de Murielle Bolle et veuve de Bernard Laroche, « le dossier est encore affaibli, une nouvelle fois, le fiasco continue ». « La justice est complètement discréditée, il y a des dégâts humains considérables, un gâchis humain et financier », a-t-il déploré.

L’affaire Grégory, considérée comme l’un des dossiers les plus énigmatiques de l’histoire criminelle en France, a été relancée en juin 2017 quand le grand-oncle et la grand-tante de l’enfant – les époux Jacob qui n’avaient jamais été inquiétés auparavant – et Murielle Bolle ont été mis en examen, soupçonnés d’avoir commis un « acte collectif » avec Bernard Laroche. Mais ces poursuites ont ensuite été annulées pour des questions de procédure.

LQ/AFP