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À Colmar, les noms de rue font polémique


À Colmar, en Alsace, la municipalité a décidé de traduire une partie des noms de rue en allemand. Un choix qui réveille chez certains le traumatisme de la germanisation forcée sous l’occupation nazie.

Un passé qui ne passe pas… L’initiative de la mairie de Colmar de traduire des plaques de rue en allemand remue de mauvais souvenirs chez certains habitants, conduisant la ville à opter pour l’alsacien, moins polémique.

On est en effet seulement à quinze kilomètres à vol d’oiseau du Rhin et de la frontière allemande, et défendre le bilinguisme pourrait paraître naturel dans la capitale du Haut-Rhin, surtout dans une région ballottée au cours de l’histoire entre France et Allemagne.

Mais c’est justement le souvenir de l’annexion nazie (entre 1940 et 1945) qui a fait bondir Dominique Grimal, ancien avocat, «colmarien depuis 75 ans», en apprenant l’initiative du maire.

«Faut-il rappeler ce qu’a signifié l’annexion de fait en 1940 et tout ce qui en a découlé, l’incorporation de force dans l’armée nazie et la germanisation à outrance de la province, avec notamment la redénomination en allemand de toutes les rues et bâtiments publics ?», a-t-il écrit fin 2023 au maire Eric Straumann.

Celui-ci venait de décider de poser progressivement dans le centre historique des plaques bilingues. Lors d’une promenade dans le vieux Colmar, on peut lire ainsi en majuscules des noms de rue franco-allemands tels que «Rue de l’Église/Kirch Gasse». Avec en tout petit une mention, en minuscules : «Kerichgàss», soit le nom de la rue en version alsacienne.

De quoi agacer prodigieusement Dominique Grimal. «Nous sommes français depuis trois siècles, depuis plus longtemps que Nice et la Savoie», explique l’octogénaire qui, dans sa lettre au maire, ironisait sur les traductions municipales : «Nous avons heureusement échappé à « kommandantur » pour la gendarmerie».

«Personne ne remet en question l’appartenance de l’Alsace à la culture germanique», assure ce dernier, qui n’a rien contre le rappel des noms anciens dans la vieille ville. Mais traduire «Avenue de Paris» en «Pariser Strasse» dans un quartier récent qui n’a jamais connu la présence allemande est une «idée saugrenue».

Soucieuse de ramener la sérénité dans la ville de 70 000 habitants, la mairie a réuni en début d’année un groupe de travail qui a rendu ses conclusions. «Nous avons choisi de faire un nouveau compromis qui est un ajustement», explique Tristan Denéchaud, élu chargé du dossier.

Concrètement, là où la règle avait été choisie de traduire les noms de rues en allemand, priorité sera donnée à la traduction en alsacien, sauf là où l’allemand est ancré pour des raisons historiques, précise-t-il.

Et l’on ne touchera pas aux plaques déjà installées. Une controverse sans objet pour l’historien alsacien Christophe Woehrlé : «Notre région est bilingue, que ce soit en allemand ou en dialecte.»

Toute la question est de savoir si l’alsacien est un dialecte, existant seulement à l’oral et dont la forme écrite serait l’allemand, ou bien s’il s’agit d’une langue qui s’écrit. «Certains rapportent la langue allemande à la Seconde Guerre mondiale, ce qui est complètement ridicule. Au fond, qu’est-ce que ça change? Le dialecte est germanique», estime Christophe Woehrlé.

Mais pour les plus anciens, le passé reste douloureux. À la différence du reste de la France, occupée par l’armée allemande pendant la guerre, l’Alsace ainsi que la Moselle ont été annexées au Reich. Colmar est devenue «Kolmar» et dès le 2 juillet 1940, une ordonnance imposait la germanisation des noms de lieux.

Dans la foulée, les commerces devaient «défranciser» leurs façades, puis les Alsaciens dont le nom était à consonance française ont dû le germaniser. À Colmar, près du quart des noms d’artères ont ainsi été modifiés, l’avenue de la République devenant «Adolf-Hitler Strasse».

L’usage du français était interdit, mais aussi celui de l’alsacien, rappelle encore Christophe Woehrlé. «Il y avait trop de mots français. Par exemple, en alsacien, on ne dit pas « guten tag », on dit « bouchour ».»

Aujourd’hui, selon lui, seuls 12 % à 13 % des Colmariens parlent encore l’alsacien. «L’alsacien, c’est sympa, même si je ne le parle pas», déclare Claire Verdère, qui vend des glaces sur une place touristique de la ville.

À 28 ans, elle ne comprend pas la controverse sur les noms de rues et la période de l’annexion. «Il faut tourner la page», estime-t-elle. Quant aux Allemands, «heureusement qu’ils sont là» pour faire marcher le commerce.

Un commentaire

  1. Nous sommes tous les descendantes de charllemagne sauf les rouquines irlandaises comme moi. Si l empereur n avait eu qu un fils, nous parlerions la même langue. Sauf les rouquines trilingues. Aux yeux verts. Hitler n a pas eu l intégrité d avoir des yeux rouges sur fond de costume noir. C etait forcément un looser de naissance.

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