Le quinquagénaire poursuivi pour avoir mis le feu à un camion en stationnement dans le centre d’Esch-sur-Alzette a dû s’expliquer, mardi matin, à la barre.
Les faits reprochés au prévenu remontent au soir du 14mai2014. Grâce à l’intervention rapide d’un habitant du quartier avec un extincteur, le feu se dégageant du réservoir du camion avait rapidement été éteint.
Ce n’est pas vrai.» Dès le début de l’audience hier matin, le prévenu José P. (52 ans) a formellement contesté avoir mis le feu à un camion à Esch-sur-Alzette vers 23 h 20, le 14 mai 2014. Pourtant deux témoins résidant Grand-Rue affirment l’avoir vu rôder autour du camion de la société d’isolation stationné pour un chantier. Un repère important de cette soirée est le match de football FC Sevilla-Benfica qui s’est terminé par des tirs au but.
Le témoin indique qu’il était en train de fumer une cigarette à la fenêtre de sa cuisine quand il a vu sortir un homme de l’immeuble et traverser la rue en direction du camion. «J’ai remarqué qu’il avait quelque chose de blanc dans la main», a-t-il précisé. À peine 30 secondes après avoir disparu derrière le camion, que déjà il serait revenu. C’est alors que le témoin indique avoir entendu son voisin d’en face, qui lui aurait eu une bonne vue sur le réservoir, lui crier : «Appelle la police. Le vieux a mis le feu au camion.»
Dans ses dépositions à la police, ce deuxième témoin avait déclaré avoir vu le quinquagénaire se diriger vers le camion avec un briquet à la main. Il avait indiqué qu’au début il n’avait pas porté importance à cet événement jusqu’à ce qu’il aperçoive une flamme jaillir du réservoir. Ce témoin est entretemps décédé, il n’a donc pas pu être entendu, hier, par la chambre correctionnelle.
Le premier témoin, quant à lui, a expliqué être descendu avec un extincteur dans la rue : «Le capuchon du réservoir était ouvert. Ce qui avait été mis dans le trou du réservoir était en train de brûler.» Il note qu’à l’époque beaucoup de voitures avaient déjà brûlé dans le quartier et que deux fois leur immeuble avait dû être évacué, dont une fois parce qu’un 4×4 avait brûlé devant. «On vivait une situation délicate dans le quartier. Quand vous avez passé plusieurs nuits blanches…»
«J’ai ma conscience qui est tranquille, car je n’ai rien fait», s’est défendu le quinquagénaire, hier, à la barre. «Peut-être sont-ils jaloux», a-t-il laissé entendre en ajoutant que ce n’est pas un briquet, mais des clefs qu’il tenait ce soir-là en main. Lorsque la police avait sonné chez lui, il avait insisté pour se laver les mains. Son explication hier : c’est parce qu’il sortait des toilettes.
L’avocat à la défense du prévenu, Me Eric Says, a demandé l’acquittement au vu des doutes dans ce dossier. Il note que son client n’a pas d’antécédents judiciaires. Pour l’avocat, les témoins se trouvaient «à une certaine distance».
«Le danger était bien réel»
Le parquet estime toutefois que les contestations du prévenu ne sont pas convaincantes. Non seulement le quinquagénaire aurait formellement été identifié par deux témoins oculaires, mais il aurait aussi changé soudainement sa version au cours de ses dépositions. Alors que dans un premier temps, il avait affirmé être resté chez lui pendant la soirée et s’être couché après le match, dans un deuxième temps il avait prétendu être sorti dans un café pour voir une partie du match avec des copains.
L’expertise d’un chimiste avait établi que le drap déchiré saisi au domicile du prévenu correspondait aux filaments retrouvés sur le bouchon du réservoir. «L’expert a déclaré qu’il s’agit d’un article de masse, mais c’est un élément qui vient renforcer les autres», a soutenu la représentante du parquet.
Enfin le parquet a soulevé «l’énorme danger auquel le prévenu a exposé les habitants du quartier. Si le camion avait pris feu, il aurait pu se propager à un immeuble adjacent. Le danger était bien réel.» Il a requis trois ans de prison à l’encontre du prévenu. Pour un éventuel sursis, il se rapporte à la sagesse du tribunal.
Prononcé le 14 avril.
Fabienne Armborst