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Un temps d’avance

Voici maintenant plus d’un mois que les travailleurs frontaliers s’entassent de nouveau sur les routes luxembourgeoises engorgées, quand ça roule, et les «frontrainliers» dans les wagons bondés, quand il y en a et qu’un impondérable ne vient pas faire dérailler une machinerie déjà défaillante. Les uns dépensent sans compter pour remplir le réservoir, les autres perdent un temps fou. Et tous y laissent une énergie considérable. Histoire de commencer sa journée comme on la termine : sur les rotules. Au moins, la galère ne fait pas de discrimination ni de jaloux…

Depuis la fin du télétravail illimité le 30 juin dernier, rien ne bouge au niveau des accords fiscaux conclus entre le Luxembourg et ses voisins. On évite pour le moment la double imposition, mais pas la double peine donc. Les Belges attendent toujours la ratification de leur avenant (signé en octobre dernier) portant le seuil légal à 34 jours. Les Français désespèrent de voir sauter le plafond de verre de 29 jours pour atteindre, eux aussi, ce palier de 34. Quant aux Allemands, ils restent bien à la traîne avec leurs 19 petits jours autorisés.

Pendant qu’ici l’on fait du surplace, voire que l’on recule, des choses avancent ailleurs. Exemple au Portugal, qui vient de promulguer officiellement sa nouvelle loi sur l’immigration, votée par le Parlement en juillet. Parmi les mesures prévues dans le texte concernant les étrangers à la recherche d’un emploi, il en est une de notable : la loi entend en effet faciliter les formalités pour les visas destinés aux «nomades numériques», ainsi que l’on qualifie ces salariés exerçant leur activité professionnelle en voyageant grâce aux possibilités offertes par le télétravail. Si le gouvernement portugais justifie cette simplification des procédures par la nécessité de relancer sa démographie, son économie et son tourisme – mis à mal par la pandémie qui a lourdement impacté le pays –, on remarque surtout qu’il intègre une dimension sociale forte en misant à ce point sur le nomadisme numérique et, de fait, la flexibilité accordée aux employés et la liberté de pouvoir bosser n’importe où. Parce qu’ici, on a oublié le plus important : que le boulot soit fait, et dans de bonnes conditions.

Alexandra Parachini