À cinq ans, je voulais, une fois devenue grande, être Boy George parce qu’il était tout bariolé. Ça horripilait ma grand-mère. J’ai mis un certain temps à comprendre pourquoi. Boy George, comme son nom ne l’indiquait pas à la gamine non encore anglophone que j’étais, était un garçon qui se maquillait et aimait les garçons. Sauf que dans le monde de ma grand-mère, ça n’était pas concevable. Pourtant, elle aimait Luis Mariano.
Quarante ans plus tard, Boy George est un arc-en-ciel et le personnage principal de la série Netflix Glamourous est un garçon qui se maquille. Dans la vraie vie, les autoproclamés «hommes, les vrais, les durs, les tatoués» font des offrandes à John Wayne – ou à tout autre figure de mâle alpha qui les rassure – pour que leurs fils ne deviennent pas «des tapettes». Alors quand un monsieur/madame (Tatta Tom, par exemple) avec des paillettes dans la barbe vient expliquer la tolérance aux gamins, ils s’étouffent dans leur brandy américain ou se demandent ce qu’ils ont bien pu faire au bon Dieu. Cette Tatta Tom va mettre des idées étranges dans la tête de leurs rejetons. Pire, leur dire qu’ils sont libres de devenir et d’aimer qui ils veulent. Même des monstres de foire efféminés. John Wayne était peut-être hétéro, mais il était aussi raciste et misogyne. Et Tatta Tom ? Comme Miss Edna, elle est un personnage, une caricature.
Quarante ans après Do You Really Want to Hurt Me, tous les petits garçons ne sont pas devenus des homosexuels ou des grandes folles, mais Boy George a certainement évité des suicides, des vies pourries à faire semblant qu’on est un homme «un vrai, un dur, un tatoué», à se mentir à soi et aux autres parce que la société ne tolère que la binarité. Le blanc et le noir, mais pas le bariolé. Devenir quelqu’un de bien et s’aimer comme on est, voilà la leçon à tirer des lectures de Tatta Tom. La prochaine fois, elle devrait aussi inviter les parents à ses lectures. Et si ma mémoire est bonne, il y avait un cowboy dans les Village People.
excellent! 🙂 merci