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Stop à la boucherie

La viande ? «On en a besoin, sans quoi on risque d’être carencé. Mais pas autant, et surtout, pas la viande qu’on nous vend partout et dont la qualité a fort baissé», affirmait un expert en nutrition dans Le Quotidien, la semaine dernière. Des propos qui avaient peu de chance d’émouvoir le Grand-Duché, où la consommation de viande est l’une des plus élevées au monde : près de 100 kg par an et par habitant.

La bombe lâchée hier par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) fera certainement bien plus de bruit : elle accuse la charcuterie, la viande rouge et le porc de favoriser le cancer. Le cancer! Le mot est lâché. Si la viande rouge et le porc sont classés dans les produits «probablement cancérogènes», la viande transformée rejoint carrément la cigarette, l’arsenic ou l’amiante au tableau d’horreur des produits classés «cancérogènes pour l’homme».

On entend déjà les «on vous l’avait bien dit» des antiviande, les cris d’orfraie des politiques qui vont promettre illico des réformes, et ceux des consommateurs scandalisés d’avoir été trompés.

Minute. Retrouvons le plancher des vaches. Dire que la viande est cancérogène est aussi absurde que d’affirmer qu’un plat de légumes est toujours bon pour la santé : entre des légumes marinés aux pesticides et une viande luxembourgeoise labellisée, le choix est vite fait.

Non, le problème, ce n’est pas la viande, mais bien sa quantité et sa qualité, en particulier la consommation excessive de la pseudoviande industrielle. Or cette fois, le fautif n’est pas un abattoir ou une marque. C’est tout un système : les agriculteurs qui s’assoient sur les valeurs paysannes, les responsables politiques qui réagissent plus qu’ils n’agissent, les consommateurs qui savent que leur goinfrerie de bidoche sous vide a un arrière-goût de merde…

Il ne reste qu’à espérer que cette affaire fragilisera autant l’industrie agroalimentaire qu’elle valorisera les petits producteurs et les artisans. Et qu’elle nous fera prendre conscience qu’entre un bon steak de boucher une fois par semaine, et des plâtrées de bidoche sous vide, le choix n’est pas économique, mais sanitaire.

Romain Van Dyck (rvandyck@lequotidien.lu)