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Rappel à l’ordre

Le gouvernement a dû encaisser cette semaine un dur revers. La cour administrative n’a pas eu d’autre choix que de lever l’interdiction de produits à base de glyphosate. Cette décision vient entacher la fière annonce d’être, depuis début 2021, le premier pays européen à interdire cet herbicide controversé. Il est aujourd’hui confirmé que l’État est allé trop vite en besogne.

Les juges font remarquer dans leur arrêt que la seule motivation avancée par le gouvernement pour justifier l’interdiction du glyphosate était le simple renvoi à l’accord de coalition 2018-2023 qui a arrêté «l’accord des partis formant le gouvernement luxembourgeois de mettre un terme à l’utilisation de la substance active glyphosate à partir du 1er janvier 2021».

Il aurait fallu aller bien au-delà de cet argument strictement politique pour bannir ce produit phytosanitaire. La décision était à appuyer par des considérations selon lesquelles «le produit visé présente toujours un risque inacceptable pour la santé humaine ou animale, voire pour l’environnement». 

Il a fallu attendre le verdict en deuxième instance pour voir le ministère de l’Agriculture réagir. Et encore. Vendredi, une très vague étude scientifique a été annoncée qui aura pour but de clarifier la nocivité ou non du glyphosate. En attendant, l’herbicide peut à nouveau être commercialisé et utilisé au Luxembourg. Heureusement, le secteur agricole s’est habitué à renoncer au glyphosate pour cultiver ses terres.

L’épisode du glyphosate n’est pas sans rappeler le projet de loi pour légaliser partiellement le cannabis récréatif. Le Conseil d’État a fait remarquer que le texte initial s’était également limité à des «considérations d’ordre politique et de droit interne, tout en faisant entièrement abstraction de considérations relatives au droit international». Or, en matière de stupéfiants, pas moins de cinq textes européens et internationaux sont à respecter. 

Sans vouloir blâmer le travail des fonctionnaires appelés à rédiger ces projets de loi, ce double rappel à l’ordre adressé au gouvernement interroge. Il est bien d’aborder des projets ambitieux. Mais il est encore mieux de s’assurer dès le départ que leur réalisation est pleinement conforme au droit national, européen et international.