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Prophétie autoréalisatrice

Chez nos voisins français, le Front national (FN) de Marine Le Pen est le centre permanent de l’attention politique et médiatique. Pas un jour ne se passe sans que l’un ou l’autre dirigeant de parti ne s’alarme d’une extrême droite «aux portes du pouvoir». Pour un peu, la classe politique française se mettrait à entonner en chœur la célèbre chanson de Serge Reggiani Les Loups sont entrés dans Paris, en référence à l’avancée de l’armée nazie pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le problème avec ces commentaires alarmistes et faussement indignés est qu’ils tombent dans l’écueil de la prophétie autoréalisatrice, c’est-à-dire qu’ils modifient les comportements des acteurs et tendent à la réalisation de cette prophétie. Un peu, par exemple, comme lors d’une crise économique : par peur de la crise, les entreprises vont assurer leur trésorerie et mettre le holà sur leurs investissements, les États vont se serrer la ceinture en prévision des mauvais jours et éviter toute relance, ce qui aboutit de fait à accentuer et à prolonger la crise économique.

Si la montée du vote FN est une réalité, le Parti socialiste (PS) au pouvoir et Les Républicains (ex-UMP) dans l’opposition ne font que se renvoyer la responsabilité de cette ascension, plaçant Marine Le Pen au cœur du débat. Les médias, eux, se régalent et sont assurés de bons tirages ou de bonnes audiences, lorsqu’ils mettent en avant la fille de Jean-Marie, rendant son discours toujours plus audible et crédible.

Pour contrer un adversaire politique, il ne suffit pas de le dénigrer, il faut avant tout proposer une alternative. C’est sans doute là que le bât blesse. Depuis 2012, l’exécutif socialiste ne fait que subir raclée électorale sur raclée électorale, sans se remettre le moins du monde en question. Quant à Nicolas Sarkozy, il court – comme il l’a déjà fait – après les électeurs du Front national, rendant d’autant plus légitimes ses propositions. Ses déclarations d’hier sur sa volonté de restaurer «l’autorité de l’État» sentent le réchauffé de ses précédentes campagnes électorales. Il est à craindre que les électeurs ne préfèrent les produits frais.

Nicolas Klein (nklein@lequotidien.lu)

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