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Poussée de fièvre

Une semaine sous tension, faite de prises de parole, de prises de bec, d’insultes, de menaces, de dénonciations. «Mais qu’arrive-t-il au Luxembourg ?» Voilà la question que posent ceux qui nous téléphonent et qui vivent loin du Grand-Duché. Oui, qu’est-il arrivé au Grand-Duché ? La question peut se poser quand on voit les informations qui ont défilé sous nos yeux ces derniers jours. Quelque chose a changé dans le pays depuis samedi dernier, depuis les heurts qui ont éclaté dans la capitale lors de la manifestation des antipass sanitaire, anti-Covid Check, antirestrictions, antivaccins… Quelque chose s’est-il cassé dans notre société ? Et surtout, pourrons-nous réparer ?

Nous avons bien vu ce ressentiment qui montait au fil des mois. Au fil du retour des contaminations, des nouvelles restrictions. On pensait le pays relativement à l’abri de ce magma complotiste s’enivrant de fausses informations et de commentaires violents sur les réseaux. Ces groupes s’autoalimentant, refusant tout avis contradictoire, sont sortis de la virtualité pour battre le pavé. Et plus encore. Aujourd’hui, la société luxembourgeoise semble fragmentée, déstabilisée. Il y a danger dans une société quand tous pointent du doigt pour dénoncer le comportement de l’autre, quand chacun défend ses positions de la plus odieuse des manières, quand l’adversaire devient un ennemi. Ce délitement, personne ne pouvait l’imaginer au Luxembourg, pays connu pour aborder les problèmes de manière sereine dans l’échange et un certain respect mutuel. Ce «monde d’avant» a-t-il volé en éclats à cause de la pandémie ? Non, ne mettons pas tout sur le dos du coronavirus. La période du covid n’est bien souvent que le prétexte pour que s’exprime cette colère, cette haine qui couvait depuis bien longtemps.

Ce samedi, une nouvelle manifestation est attendue dans la capitale. Les slogans s’affichent déjà sur les réseaux sociaux, les menaces aussi. Elle aura lieu cette fois-ci loin du centre-ville de la capitale, loin des marchés de Noël, et sous bonne garde policière. Mais après ? Le problème sera-t-il réglé ? Non, mais il y a un remède à cette poussée de fièvre : notre modèle démocratique. Mais le traitement s’annonce long et délicat.

Laurent Duraisin