Le problème, avec les migrants, c’est qu’ils sont pressés. Pressés de quitter leur enfer quotidien pour rejoindre la terre promise. Trop pressés, sans doute, pour le lourd appareil politique de l’Union européenne. Alors, tant pis pour tous ceux qui risquent leur vie en tentant de traverser la Méditerranée, ils vont devoir attendre. Oui, attendre. C’est compliqué la diplomatie, surtout quand on n’est pas d’accord.
Et hier, à Bruxelles, l’entente était loin d’être cordiale entre chefs d’État. Il faut les comprendre, ils ont d’autres priorités, bien plus importantes : ne pas perdre la face devant le monde, renouer avec la croissance, limiter les déficits et, surtout, se faire réélire. Alors, ils ont décidé d’envoyer quelques bateaux supplémentaires en Méditerranée. Des patrouilles, pour empêcher les navires des passeurs de couler et leurs cargaisons humaines avec eux, plutôt qu’une vraie politique migratoire.
C’est simple comme une bataille navale, la politique, parfois. Sauf que les enjeux dépassent largement les moyens engagés. L’hémorragie de migrants venus de Libye ne cessera pas grâce à quelques frégates armées. Les dirigeants européens feignent de ne pas le savoir.
L’urgence européenne était en tout cas mal venue. Elle a donné de l’espoir à ceux qui n’ont rien. Elle le leur a aussitôt retiré. L’Europe n’est pas prête à accueillir la misère du monde. En tout cas, elle ne l’a pas montré. Hier, à Bruxelles, les chefs d’État de l’Union européenne ont décidé de ne pas décider. Ils se sont cachés, comme ils aiment à le faire, face à la gravité de la situation.
C’est simple, la politique, quand on n’a pas de courage. Il suffit de ne pas trancher, de prendre des décisions molles qui ne changent rien ou pas grand-chose. Il suffit de poser pour la photo de groupe et de montrer sa bonne volonté au monde.
Hier, à Bruxelles, l’Europe a une nouvelle fois affiché ses faiblesses et son indécision. Les chefs d’État ont, eux, quitté la Belgique sans contrainte. C’est ce qui importait.
Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)