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Passif-agressif

Un côté bon flic, un autre mauvais flic. Ça dépend sur quelle face retombe la pièce. Une tendance pompier pyromane. Ça dépend de ce qu’il y a à gagner quand un conflit s’embrase. Le shérif la joue passif-agressif. Sans foi ni loi. En se prétendant bon chrétien. Grand défenseur de l’ordre sacré, avec sa litanie de vœux pieux. Le gendarme du monde prône la paix universelle, en même temps qu’il déstabilise un équilibre déjà fragile d’un bout à l’autre d’une planète en perdition.

Il est tentant de le juger malade de ses contradictions. Sauf qu’il n’y a rien de pathologique dans l’attitude des États-Unis. Le discernement n’est certainement pas aboli, en dépit de la santé déclinante de leur dirigeant actuel. Ou du degré d’irresponsabilité du prochain. En matière de double jeu, trouble et dangereux, Joe Biden sait parfaitement ce qu’il fait. À Gaza, par exemple. Petit territoire de presque rien, devenu un vaste cimetière. D’innombrables victimes emportées par la faucheuse israélienne ou terrassées par l’arme de la faim. Les Palestiniens doivent se contenter d’une aide alimentaire américaine qui leur parvient péniblement. Quand des bombes tout aussi américaines leur tombent sur la tête bien plus régulièrement. Paradoxe consternant et écœurant. Sans cet appui massif, l’État hébreu ne pourrait assurément plus continuer de nourrir l’orgueil insatiable d’un seul homme.

Pour autant, l’on apprenait vendredi que le secrétaire d’État Anthony Blinken a rencontré Benjamin Netanyahu pour «insister sur l’urgence d’accroître l’aide humanitaire» et le «sommer de ne pas lancer d’offensive terrestre majeure à Rafah». Et que Washington a porté devant le Conseil de sécurité de l’ONU un projet de résolution mentionnant «la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat et durable». Ceci après avoir opposé son veto aux précédents textes similaires.

Hier, la Maison-Blanche encourageait le va-t-en-guerre dans sa quête de vengeance. Aujourd’hui, elle durcit le ton. Ou comment souffler le chaud et le froid. Il ne faut dès lors pas s’étonner que de tels discours, cette fameuse «ambiguïté stratégique» répétée à l’envi sur tous les fronts, galvanisent la rhétorique belliqueuse des régimes autocratiques.

Alexandra Parachini