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Ne renoncer à rien

L’annulation de la grande braderie de Lille pour des raisons de sécurité, annoncée vendredi par la maire de la ville, Martine Aubry, après celle de plusieurs spectacles estivaux partout en France, pose une question fondamentale, qui dépasse même la responsabilité des pouvoirs publics. Doit-on céder à la peur?

Toutes ces annulations sont autant de défaites de la liberté, celle à laquelle s’attaque, jour après jour, le groupe terroriste Daech. Et autant de victoires pour l’obscurantisme dans lequel il souhaite plonger le monde. On rétorquera l’implacable argument des risques, ces risques si mal évalués à Nice, le 14 juillet dernier. Il est incontournable, surtout pour ceux qui portent la responsabilité de décider.

Mais la tristesse d’un pays touché par le deuil ne saurait être amplifiée par l’absence de ces fêtes exutoires, à même de faire oublier la souffrance et de ramener à la vie les plus fragiles. Il est certain que les pouvoirs publics détiennent des informations qui les aident à prendre ces décisions. Et que le principe de précaution doit prévaloir, quand cela est nécessaire.

Le 20 novembre 2015, une semaine après les terribles attaques de Paris, le comédien François Morel lançait, sur les ondes de la radio France Inter, un cri du cœur. Il est bon de le rappeler ici. «Ne renoncer à rien. Surtout pas au théâtre, aux terrasses de café, à la musique, à l’amitié, au vin rouge, aux feuilles de menthe et aux citrons verts dans les mojitos, aux promenades dans Paris, aux boutiques, aux illuminations de Noël… Ne renoncer à rien. Ne renoncer à rien. Ne renoncer à rien. Surtout pas à Paris, surtout pas aux amis, surtout pas à la vie.» Car renoncer, c’est donner raison à la folie, perdre un peu plus de terrain à chaque fois que le non l’emporte sur le oui.

L’horreur frappe toujours quand on ne l’attend pas alors il faut, nécessairement, continuer à vivre pour profiter de tout ce que le monde peut offrir. Et ne renoncer à rien.

Christophe Chohin (cchohin@lequotidien.lu)