Accueil | Editoriaux | Ne pas négliger le fond

Ne pas négliger le fond

Salaire minimum en hausse, légalisation du cannabis récréatif et gratuité des transports en commun. Voilà les trois idées que l’opinion publique retient du nouveau programme politique de la Gambia II. Trois idées qui ont mis le Luxembourg sur le devant de la scène médiatique, notamment à l’international où le cannabis et la gratuité des transports ont intéressé plusieurs médias, dont le célèbre New York Times. Trois idées contribuant au nation branding du pays et à son «Let’s make it happen». Mais trois idées amenant à une quantité d’interrogations pour le moment sans réponses. Car ces trois idées sont à première vue très modernes, pour ne pas dire relativement bonnes. Mais le diable se cache souvent dans les détails.

Si augmenter le salaire minimum semble être un bon coup de pouce pour les salariés les plus fragiles, la question du financement se pose évidemment. Mais la question des grilles salariales va indéniablement se poser dans les entreprises avec des salariés qui vont se retrouver au salaire minimum et qui vont demander une légère augmentation, mettant encore un peu plus la pression sur les patrons des PME luxembourgeoises. Pour le cannabis, là aussi, des questions annexes se posent. Par exemple, un patron pourra-t-il renvoyer un employé si ce dernier a commis une faute professionnelle en étant sous l’influence du cannabis ? Si oui, comment peut-il le prouver ? Idem dans la fonction publique. Enfin, la gratuité des transports en commun pose également des questions sur le financement.

Il est sans doute encore trop tôt pour exiger des réponses claires sur toutes ces questions, le gouvernement étant à peine formé. Mais à jouer la carte de la modernité, le gouvernement va devoir plus rapidement qu’à l’accoutumée donner des garanties et des précisions claires sur la faisabilité de ces trois idées. À défaut, l’opposition et les électeurs se feront une joie de décrire la Gambia II comme un «gouvernement marketing», misant sur l’image au détriment du fond. Car s’il y a bien un enseignement à tirer du mouvement des gilets jaunes en France, c’est que les électeurs ne sont plus aussi naïfs qu’auparavant et sans doute sont un peu plus impatients.

Jeremy Zabatta