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Maître chanteur

Au bal de Bruxelles, c’est toujours Viktor Orbán qui mène la danse. Le dirigeant nationaliste hongrois fait tourner ses homologues en bourrique, surtout. En jouant sa propre partition et en imposant un tempo disruptif à l’orchestre mal accordé des Vingt-Sept, incapables de s’entendre ni de parler d’une seule voix. L’électron populiste est devenu bien trop libre de court-circuiter cette fragile harmonie et de faire ce qui lui chante.

Mercredi, juste avant des retrouvailles au sommet en ce jour, l’Union européenne lui a proposé un compromis sous forme de débat annuel sur l’aide financière versée à Kiev, dans l’espoir de le pousser à valider une rallonge de 50 milliards d’euros promise sur quatre ans. Que le soliste bloque ainsi depuis la fin de l’année dernière, si peu enclin à épauler plus longtemps ses voisins malmenés par l’ami russe. L’Ukraine est «un problème grave pour l’Europe», considère-t-il sans trémolos dans la gorge. Le ton est donné.

Rappelons le prélude à cette dissonance : le Premier ministre a opposé son veto afin d’obtenir le versement de fonds européens destinés à son pays, actuellement gelés en raison des manquements à l’État de droit qui lui sont reprochés depuis de nombreuses années. «Chantage et prise d’otages», ont alors hurlé en chœur les chefs des États membres. Des cris d’orfraie, du reste. Dont Viktor Orbán se moque éperdument. Le geste d’hier est présenté comme une «main tendue». Si cette main ne lui donne pas ce qu’il attend de pied ferme, il prendra ses grands airs, engagera un nouveau bras de fer. Et enverra tout valser une fois de plus.

La plupart finissent par s’incliner devant les exigences du maître chanteur, quand quelques-uns tentent de le faire marcher à la baguette. Sur ce dossier ukrainien, la Pologne assure qu’une solution sera trouvée «avec ou sans» Budapest. Selon la mélodie qui bruisse ces jours-ci, en cas d’énième anicroche, la Commission agiterait sérieusement la menace de priver la Hongrie de tous les fonds qui lui sont dévolus. Difficile d’y croire, pour l’instant. Car les paroles sont généralement impossibles à tenir et s’oublient très vite. Tout le monde connaît la ritournelle : c’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens.

Alexandra Parachini

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