L’occasion était belle pour le ministre des Finances d’annoncer lundi une baisse du nombre de rulings accordés par le fisc alors que le lendemain s’ouvrait le nouveau procès en appel d’Antoine Deltour, le lanceur d’alerte du scandale LuxLeaks. Les rescrits nouvellement émis sont passés de 570 en 2016 à 260 en 2017, soit 54% de moins. Le coup de com, néanmoins, tombe à plat.
Quand bien même le pays voulait se désintoxiquer de ces accords dont profitent les entreprises les plus riches, il n’en demeure pas moins l’un des principaux émetteurs dans l’Union européenne. Et il continue à traîner sa mauvaise réputation de paradis fiscal dont les rulings ne sont finalement qu’une facette.
C’est de Belgique qu’en est venue la démonstration mardi quand Le Soir et De Tijd ont révélé sous le nom de LuxFiles qu’une majorité des cent Belges les plus riches passent par des entreprises boîtes aux lettres créées au Grand-Duché pour échapper aux impôts dans le Royaume. Et encore, ajoutent les deux quotidiens, pour nombre de ces grandes fortunes, les sociétés luxembourgeoises ne servent qu’à transférer incognito les fonds vers des cieux fiscaux encore plus ensoleillés, comme le Panama ou les Caïmans. À ce stade, les domiciliataires de ces sociétés écrans sont de simples transitaires. Autant les intégrer tout de suite au hub logistique en cours de développement.
Et hier, tout comme le sparadrap qui colle indéfiniment aux doigts, les rulings sont venus se rappeler aux bons souvenirs du gouvernement avec une possible ouverture d’enquête de la Commission européenne. Dans le viseur, une holding financière de Volkswagen dans laquelle seraient logés 5,8 milliards d’euros très peu taxés, moyennant un ruling dont l’exécutif européen douterait de la légalité. Si cela se confirme, la firme allemande sera, après Engie, Amazon, Fiat et McDonald’s, la cinquième multinationale épinglée par Bruxelles pour cette raison.
D’après l’OCDE, 5 600 rulings sont toujours en cours de validité au Luxembourg. Mieux vaudrait, à l’avenir, éviter tout triomphalisme.
Fabien Grasser