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L’homme clé

Sacré semestre ! La présidence luxembourgeoise du Conseil de l’Union européenne, démarrée le 1er juillet et s’achevant officiellement ce 31 décembre, a coïncidé avec l’une des pires crises traversées par l’UE.

De la dette grecque aux attentats de Paris, de la menace de «Brexit» à l’afflux de réfugiés du Moyen-Orient, les Vingt-Huit ont senti vaciller les bases mêmes de l’esprit qui avait animé les pères fondateurs. Une fracture profonde se fait jour entre pays du Sud et de l’Est, ces derniers – mais ils ne sont pas les seuls – entonnant de façon de plus en plus entêtante le refrain du «chacun pour soi», plaçant leurs intérêts nationaux avant le principe de solidarité.

Que pouvait bien faire un «petit» pays comme le Grand-Duché face à ce tourbillon d’événements tragiques, aux implications planétaires. Il a fait ce qu’il a pu, a-t-on d’abord envie de répondre, étant entendu que nul autre aurait peut-être fait mieux. D’autant que le système de la présidence tournante de l’UE s’est politiquement affaibli ces dernières années, ne serait-ce que parce que les 28 États membres n’occupent plus cette fonction que tous les 14 ans.

L’actualité a relégué les ambitions luxembourgeoises du début de la présidence au second plan, notamment sociales. Ce sont les relations internationales qui ont occupé le devant de la scène, conférant au ministre des Affaires étrangères le premier rôle. De Kiev à Moscou, d’Athènes à Lampedusa, Jean Asselborn a, pendant ces six mois, agi avec le souci d’apaiser les tensions, de faire dialoguer les adversaires. Les diplomates étrangers en poste au Luxembourg jugent qu’il a été l’homme clé de cette présidence, louant autant son caractère amène que ses discrètes médiations pour tenter d’arrondir les angles dans un contexte explosif.

Alors que d’aucuns le voyaient lâcher son poste après la présidence et que le gouvernement vient de procéder à un urgent remaniement, Jean Asselborn sort renforcé de ces six mois. On voit mal comment, aujourd’hui, le gouvernement pourrait se passer de son expérience et de sa popularité sans égale dans le paysage politique. Lorsque, en 2013, Étienne Schneider avait lancé son OPA sur le LSAP, il avait plaidé le nécessaire renouvellement de génération, concédant que l’expérience des anciens du parti leur serait toutefois utile.

Il est à croire que les «anciens» n’avaient pas tout à fait dit leur dernier mot.

Fabien Grasser (fgrasser@lequotidien.lu)

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