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Le mal élu

Les plus de 10 millions de voix obtenues par Le Pen ne sont «pas un point de détail», constatait dès 20h dimanche, le quotidien Libération. En 2012, la candidate d’extrême droite avait rassemblé 6,4 millions d’électeurs. La progression est impressionnante. C’est la toute première leçon à retenir de cette élection qui ne constitue en aucun cas un triomphe pour Emmanuel Macron.

Élu avec quelque deux tiers des suffrages, le candidat d’En marche! a bénéficié du vote utile d’une partie de la gauche et de la droite, mais il fait aussi face à un fort taux d’abstention (26 %), presque un record sous la Ve République, et à un nombre sans précédent de bulletins nuls ou blancs (4,5 millions). En récoltant quelque 20 millions de suffrages, Macron ne fait guère mieux que Hollande en 2012 et Sarkozy en 2007, chacun ayant rassemblé plus de 18 millions d’électeurs. Et il fait évidemment moins bien que Jacques Chirac en 2002 qui, face à Le Pen père, avait recueilli 25 millions de suffrages sur son nom. Pour Macron, le plus dur sera de trouver une majorité parlementaire pour mener son projet. Les sondages – qui valent ce qu’ils valent mais ont vu juste dans cette élection – indiquaient que 70 % des électeurs du nouveau président souhaitent qu’il n’obtienne pas de majorité absolue à l’Assemblée. Qu’ils soient de gauche ou de droite, leur message est clair : ils ont voté contre Le Pen et non pour lui.

Ce résultat va sonner l’heure des clarifications dans les deux partis de gouvernement traditionnels : le PS et LR. L’éclatement a commencé dimanche soir en direct sur les plateaux de télé avec des ténors des deux partis adoubant le nouveau maître de l’Élysée. La course aux postes est lancée. La routine en somme.

Pour Macron, le «troisième tour» des législatives sera compliqué car il a été élu par défaut. Les Français n’adhèrent pas à son programme de dérégulation sociale et économique. Il pourrait être confronté à un quatrième tour dans la rue s’il persiste à ignorer le message qui s’est fait fortement entendre à gauche ces derniers mois. S’il veut, comme il l’a prétendu, unir le pays, il doit commencer par accepter ce fait : il est mal élu.

Fabien Grasser

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