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Le droit de garder le silence

« Alexa, qui va gagner la Coupe du monde?» La réponse de l’assistant vocal fait sourire tout le monde : «Je dois vous avouer que j’ai revu mon pronostic, car je n’avais vraiment pas prévu l’élimination de l’Allemagne», avoue la voie digitale, qui mise désormais sur l’Espagne…

Moment surréaliste, vendredi matin, sur les ondes françaises. La présentatrice de l’émission L’Instant M sur France Inter réalise la première interview croisée de Siri (HomePod) et d’Alexa, les assistants vocaux d’Apple et d’Amazon. Sur le marché depuis peu, ces enceintes connectées ont vocation à devenir le majordome digital de la maison du futur. Bon, il leur manque encore les bras et les jambes, mais la tête, elle, se veut à la pointe de l’intelligence artificielle. Une question sur la météo, la fission nucléaire, le sexe des anges ou le Mondial? Il suffit d’appeler l’assistant par son prénom et, en principe, la réponse fuse… sauf malentendu.

Rejoindront-ils le cimetière des objets high-tech ratés, comme les Google Glass? Les consommateurs décideront. En attendant, soyons honnêtes, il est difficile de résister à la curiosité : on a tous envie d’essayer ces robots qui titillent notre appétit de nouvelles technologies. Mais toutes les inventions ne sont pas des progrès. Surtout quand on n’en cerne pas bien toutes les conséquences. L’animatrice s’en amuse lorsqu’elle demande à Alexa : «Est-ce que tu m’espionnes?» – «Désolé, je ne sais pas.» Belle langue de bois numérique! En réalité, à partir du moment où vous appelez l’assistant, tout est enregistré. Et supprimer ces conversations est très compliqué.

Il faut rappeler qu’en plus, ces assistants s’intéressent à tous vos objets connectés, depuis vos smartphones jusqu’à votre domotique. Où s’arrêtera l’assistance et où commencera l’espionnage? Nous ne sommes qu’au début de cette révolution de l’intelligence artificielle. Les opportunités sont fabuleuses, mais vont de pair avec les risques. Notre chance, sûrement temporaire, est d’avoir encore le choix. Pour reprendre la phrase policière, «Vous avez (encore) le droit de garder le silence.» Car «tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous».

Romain Van Dyck

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