Près de 87 % des voix, pas vraiment la peine de recompter. Vladimir Poutine a remporté haut la main l’élection présidentielle. Il a pu jubiler hier sur la place Rouge et a fait comme si la quasi-totalité de son peuple l’adulait, le portait aux nues et mettait entre ses mains la destinée de toute une nation vers un avenir glorieux.
Le jeu de dupes va continuer et, en secret, la résistance au maître du Kremlin va faire ce qu’elle peut pour montrer que la Russie a encore une âme, a encore le courage de s’élever contre cet homme qui a décidé d’embarquer sa population, qu’elle le veuille ou non, dans sa guerre contre l’Ukraine, contre l’Occident, contre tous ceux qu’il considère comme un danger pour son royaume qu’il souhaite de plus en plus grand.
Le scrutin, qui s’est déroulé sur plusieurs jours, a vu apparaître quelques citoyens, anonymes, prêts à tout pour protester. Certains ont versé un flacon d’encre dans les urnes pour indiquer leur désaccord avec cette mascarade électorale. D’autres, plus radicaux, ont mis le feu à l’isoloir devant le regard médusé des assesseurs ou ont jeté des cocktails Molotov contre des bureaux de vote. La colère est là, tapie dans l’ombre, même jusqu’en Russie.
Peut-être ces citoyens en avaient-ils marre de faire le jeu du Kremlin en participant à cette élection gagnée d’avance pour Poutine, qui faisait face à des concurrents fantoches ? Peut-être ces électeurs avaient-ils en tête la longue liste des noms des opposants au pouvoir morts en prison, décédés mystérieusement ou désormais en exil ? Le courage russe s’est aussi exprimé dans les pays européens.
L’opposition, menée notamment par Ioulia Navalnaïa, la veuve d’Alexeï Navalny, avait organisé une action symbolique devant les représentations consulaires russes à travers le continent. L‘opposition avait appelé les Russes à l’étranger à honorer la mémoire de l’opposant, mort dans une prison du régime en Sibérie en février, en se rendant à midi devant les bâtiments pour aller voter. Des milliers de personnes ont participé à cette action. Hier, Poutine a été acclamé sur la place Rouge. Du bruit qui ne couvrira pas les voix qui se battent au quotidien pour rendre à la Russie sa dignité.