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La peur du jour d’après

Dimanche, les citoyens de la plus grande nation du monde vont se rendre dans les bureaux de vote pour élire leur nouveau président. Sans surprise, Vladimir Poutine en sortira grand vainqueur.

S’il est facile de parler de la Russie de Poutine comme d’une dictature au lieu d’une démocratie différente des pays occidentaux, la question à se poser est ailleurs : pourquoi les Russes soutiennent-ils depuis décembre 1999 le natif de Saint-Pétersbourg ? Pour tenter d’y répondre, il faut se plonger dans le quotidien des Russes qui au fil des années ont vu leur vie s’améliorer. Certes, ce n’est pas parfait et la politique du Kremlin est largement critiquable de notre point vue occidental. Pas de liberté de la presse, large corruption, haine des homosexuels, passage systématique des opposants politiques par les prisons du pays ou encore un jeu diplomatique effroyable notamment en Syrie.

Mais encore une fois, nous regardons la Russie avec nos yeux d’Occidentaux. Mettons-nous dans la peau d’un Russe ayant connu l’ère communiste, sa chute en 1991, puis un pays laissant son peuple plein d’espoir alors qu’il était à la dérive sous Boris Eltsine. La famine, la pauvreté, des magasins alimentaires désespérément vides, une insécurité nourrie par les mafias locales, le quotidien des Russes n’a pas toujours été ce qu’il est aujourd’hui.

Anne Nivat, grand reporter indépendante, qui vient de passer plusieurs mois à sillonner la Russie et qui publie un livre sur la question – Un continent derrière Poutine ? – est arrivée à un constat édifiant en rencontrant les citoyens russes. Ces derniers ont peur de l’après-Poutine, peur d’un déchirement au Kremlin, d’une lutte de pouvoir au détriment des Russes. Même s’ils reconnaissent bien des défauts à Poutine et sa politique, les Russes, mis à part les plus jeunes, préfèrent encore l’ancien homme fort du KGB à un nouveau Boris Eltsine, ou pire, à un homme plongeant encore une fois les Russes dans l’incertitude au quotidien ne serait-ce que pour faire des courses et manger.

Comment en vouloir à des gens de préférer la peste au choléra, surtout quand ces personnes ont connu le choléra ?

Jeremy Zabatta

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