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Juge et partie

La motion de censure contre Corinne Cahen, déposée jeudi par l’opposition, a donné lieu à un règlement de comptes à la Chambre, indigne du statut d’honorable qui doit être celui des députés. Le débat sur le fond a rapidement fait place à une foire d’empoigne. Tout moyen était bon pour enfoncer ou défendre la ministre de la Famille, accusée d’avoir failli à protéger au mieux les résidents des structures pour personnes âgées.

Deux, oui deux petits mots, ont suffi à allumer la mèche. Au départ, opposition et majorité étaient d’accord pour inviter le gouvernement à commander «immédiatement une étude indépendante externe» afin de faire toute la lumière sur la multiplication des foyers d’infection dans les maisons de soins et de repos. La majorité a souhaité ajouter la formulation «en collaboration» avec les ministères de la Santé et de la Famille. Simple tournure pour souligner le besoin de fournir les données nécessaires ou tentative de cacher la vérité? Pour l’opposition, le CSV de Michel Wolter en tête, le verdict était vite tombé. Après avoir affirmé tout au long du débat ne vouloir «accuser personne», le député a brandi sans hésiter la motion de censure. Marteler s’être basé uniquement sur des «faits» n’est pas suffisant pour écarter l’impression que le CSV, soutenu par l’ADR, déi Lénk et les pirates, a voulu être à la fois juge et partie.

Loin de nous de vouloir prendre la défense de la ministre de la Famille, qui, même si elle a été sauvée par les siens, manque de répondant lorsqu’elle est mise sous pression. Mais en tout état de cause, ce dossier aurait mérité d’aller au-delà d’une enquête purement à charge, polluée par la politique politicienne.

La Chambre a pourtant en main un instrument qui peut et doit même éviter ce genre de règlement de comptes. Contrairement à nos voisins belges, la commission d’enquête parlementaire reste toutefois une rareté au Luxembourg. Pourquoi? Une réponse claire fait défaut. Le triste spectacle de jeudi vient confirmer l’urgence d’adopter la nouvelle Constitution – réforme également marquée par des manœuvres politiques – qui prévoit qu’un tiers de députés sera suffisant pour lancer une telle commission. Tout le monde en sortirait gagnant.

David Marques