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Idées fixes

Ouvrir un tiers-lieu culturel dans un squat, passer son permis de conduire pour faire le tour de l’Europe en camping-car, enregistrer un album, lancer sa marque de vêtements… Kim a des idées. C’est tout ce qui lui reste. À 40 ans passés, il est toujours au même point qu’il y a vingt-cinq ans, avec des dents en moins et des cicatrices en plus. Kim fait du surplace entre un passé et un présent noyés dans l’alcool et un avenir rêvé dans les volutes de crack. Sa situation, il est encore suffisamment lucide et intelligent pour la connaître. «C’est à moi seul de décider si j’ai envie de me prendre des coups et par qui», lance-t-il dans un état second lors d’une énième confrontation qu’il a lui-même cherchée. 

La rue, les squats, les logements de fortune, les plans chez «des potes» qui échangent un coin de canapé contre une dose de drogue, Kim a tout fait, tout connu. Même le travail. Pas longtemps. Ses addictions lui ont ôté toute discipline. Kim se couche souvent à l’heure où d’autres se lèvent et se lève à l’heure où d’autres se couchent quand il ne fait pas la manche. L’interdiction, il s’en fout. Comme du reste. Un jour, une de ses idées fonctionnera. Un jour, on lui reconnaîtra du génie. Un jour, il sera vraiment libre dans cette société qui ne le comprend pas et le rebute avec toutes ses règles et ses hypocrisies. 

En attendant, il a choisi de vivre en marge avec tout ce que cela comporte, dit-il. Avec une bande de marginaux qui le comprennent. Des potes de galère qui ont toujours une bière ou un paquet de cigarettes à partager. Des gens qui font peur aux bourgeois avec leurs tronches de travers, leurs voix qui portent et leur hygiène toute relative. Des gens qui paraissent perdus, irrécupérables, inutiles, incorrigibles. Sur le pavé, il y a les Kim, mais il y a aussi ceux dont la vie a basculé sur un coup du sort, il y a les malades, les déboutés… Mettre un toit au-dessus de leur tête ne suffira pas à les sortir de la rue. C’est une partie de la solution. Le reste est, comme pour n’importe qui, une question de volonté et de mains tendues au bon moment.

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