Ils étaient les héros de la pandémie. Les médecins et le personnel de santé. Le personnel des supermarchés. Le personnel de nettoyage ou encore les éboueurs. Ils étaient tous en première ligne lorsque le reste du pays s’est retrouvé confiné. Retranchée entre ses quatre murs, une frange de la population active a découvert les avantages du télétravail. Les élèves et les étudiants ont eu droit à des cours en ligne. Très difficile fut le retour au «monde d’avant». Le retour aux routes et aux transports publics bondés. Le retour du manque de temps pour mieux allier vie privée et vie familiale. La frustration a fait que les héros d’hier ont vite été oubliés. Mais eux n’ont pas la possibilité de télétravailler ou d’éviter de longs trajets pénibles en voiture, train ou bus.
Ces quelques lignes suffisent à illustrer la fracture qui risque de se créer sur le marché du travail. À un moment où la pression s’accentue pour augmenter les contingents de jours de télétravail autorisés pour les salariés résidents, mais surtout pour les frontaliers, les inégalités qui risquent de se creuser ne doivent pas être négligées. Le fait que l’économie luxembourgeoise soit portée par un secteur tertiaire omnipotent ne change rien à ce constat. Un peu plus de télétravail peut aussi causer des dommages collatéraux, sociétaux et économiques. L’Horeca souffre ainsi toujours d’un manque de clientèle, en dépit du retour progressif au bureau des salariés.
Trouver le bon équilibre ne sera pas chose aisée, que ce soit pour le gouvernement, pour le camp patronal ou pour le camp syndical. Mardi, lors d’un débat sur l’année électorale 2023 organisé par la Chambre de commerce, Michael Agostini, le représentant du DP, a affirmé, maladroitement, que «la promotion plus poussée du télétravail ne doit pas être liée à la survie de l’Horeca». Il est vrai que la flexibilisation du travail devient un critère d’embauche majeur, en particulier dans le secteur financier. Mais cela ne pourra pas se faire au détriment d’autres secteurs économiques ou des cols bleus, terme utilisé autrefois pour décrire les ouvriers. Aujourd’hui, il inclut tous les travailleurs qui n’ont pas d’autre choix que de prester en présentiel.
Toute fracture sociale supplémentaire doit être évitée.