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Et en plus ils aiment ça

Quel paradoxe que le résultat du premier tour de la présidentielle française. Que n’a-t-on dit ces derniers mois sur le dégoût et le rejet qu’inspirent aux Français l’affairisme des politiques, les allégations de corruption et d’enrichissement personnel ? Le candidat socialiste, Benoît Hamon, avait assez justement fustigé une campagne «polluée par l’argent». Et pourtant, les trois premières marches du podium sont occupées par les candidats sur lesquels se sont précisément concentrés les soupçons.

L’emploi d’attachée parlementaire de l’épouse de François Fillon a confisqué en partie le débat politique. Il termine la course bon troisième, devant des candidats dont la droiture n’a pourtant jamais été mise en cause. Peu importe la nature du travail de Penelope, Fillon a affiché un déni quasi pathologique vis-à-vis de faits qu’il a reconnus à rebours. Mis en examen, il devra répondre des accusations portées contre lui. À moins qu’elle ne soit élue le 7 mai, le même sort est promis à Marine Le Pen, également rattrapée par des emplois présumés fictifs d’attachés parlementaires, au Parlement européen cette fois. Le Front national et plusieurs de ses dirigeants sont en outre mis en examen pour des soupçons de financement illégal de campagnes électorales. Le FN aussi pourri que ceux dont il blâme l’indélicatesse ? L’électeur n’en a cure : la cheftaine de l’extrême droite sera au second tour.

Bien que rien ne soit venu étayer les imputations contre Emmanuel Macron, sa campagne a baigné dans une sulfureuse odeur de fric. Il en va ainsi des millions qu’il a gagnés quand il sévissait pour Rothschild et qui auraient fondu comme neige au soleil. Ou encore de son absence de transparence sur l’identité de ses soutiens financiers, alors qu’il traîne la réputation d’être le poulain du patronat. Peu importe, il sort favori d’un scrutin dont il était dit que les électeurs allaient s’emparer pour renverser la table.

Tout s’est passé comme si les affaires ne jouaient aucun rôle. Il faut croire que les Français aiment ça, au point même d’en redemander. Comme si triche et dissimulation étaient devenues la norme.

Fabien Grasser