Du déshonneur à la mort

C’est un fait divers qui promet de faire couler beaucoup d’encre. Un père de famille en visite à Dubai a préféré laisser mourir sa fille de noyade plutôt que de laisser les secours intervenir et faire leur travail. Son origine «asiatique», laissée vague dans les médias, ne permet heureusement pas de faire d’amalgame douteux quant à la bêtise de cet individu et sa religion ou culture. Ce dernier aurait indiqué qu’il préférait voir sa fille morte que déshonorée par des sauveteurs étrangers. C’est donc prendre un risque énorme car, lorsqu’on se trouve dans un autre pays que le sien pendant les vacances, il y a de très grandes chances pour que les sauveteurs soient donc étrangers.

Pour des yeux d’Occidentaux, privilégier la mort au déshonneur est aberrant. Dans la plupart des cultures et religions, la vie est cependant une priorité. Difficile donc, d’Occident ou non, de cautionner un tel acte. D’autant que la fille et le reste de la famille n’ont pas eu droit au chapitre. Le père de famille, qui va néanmoins devoir répondre de ses actes devant la justice, s’est senti dans son bon droit de décider pour elle. Alors que sa fille était majeure, il a cru bon d’outrepasser ses droits pour sauver son honneur. De penser qu’elle valait mieux pure et morte que vivante et déshonorée. Ouf donc, l’honneur est sauf. En espérant que cela soit d’une quelconque utilité pour cette pauvre fille dans l’au-delà, si au-delà il y a.

Ce qui n’est donc, a priori, qu’un sordide fait divers rappelle néanmoins que des parents fanatiques peuvent jouer avec la vie de leur progéniture, de par leurs croyances. D’ailleurs, parfois, les croyances ne sont pas en cause. En effet, il y a quelques jours, une enfant de trois ans a été «oubliée» par sa famille sur une aire d’autoroute française pendant plus de deux heures. Les deux affaires n’ont pas de lien, dans le deuxième cas, la petite fille n’étant pas décédée. Mais s’il ne faut pas sous-estimer le travail de parent, on peut néanmoins se dire que, décidément, avoir un enfant est à la portée de n’importe quel imbécile.

Audrey Somnard (asomnard@lequotidien.lu)