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Démons et fantômes

Tyre Nichols, Keenan Anderson… Des noms qui résonnent fort dans l’actualité, ces derniers jours. En milieu de semaine, celui d’Anthony Lowe est venu allonger la liste macabre des citoyens noirs morts sous le coup des violences policières. Lui, amputé des deux jambes, est tombé sous les balles des flics, en banlieue de Los Angeles.

Des noms et des visages qui frappent les esprits, avant de s’effacer. La mémoire collective devient plus sélective, au gré du matraquage médiatique autour de sujets qui heurtent moins. On a presque oublié George Floyd en 2020. Et qui se souvient encore de Rodney King, passé à tabac en 1991, dont l’acquittement des agents à l’origine de sa fin brutale avait embrasé la Cité des Anges.

Ne reste que des fantômes, qui ne pourront même pas hanter les nuits de ceux dont le crime restera impuni, ni de ceux qui laissent faire. Les drames bouleversent la nation et des hommes continuent de salir l’uniforme sans inquiétude. Au mépris des familles à jamais tourmentées de leur vivant. Malgré les larmes nourries par la douleur, l’indignation portée par la colère. Malgré, aussi, les images toujours accablantes qui montrent la réalité crue et sans filtre. Les suppliques adressées aux bourreaux saisissent d’effroi autant que les mains accomplissant la sinistre besogne sans trembler.

L’Amérique est incapable d’exorciser ses vieux démons, quel que soit le président jurant les grands dieux de faire la chasse aux sorcières et brebis galeuses, les doigts posés sur la Bible. Tandis que les garants de la loi et de l’ordre tuent. Et beaucoup. En 2022, le nombre de décès lors d’interpellations a connu un triste record. Le plus haut relevé au cours de la décennie : 1 186 victimes à déplorer, selon le site Mapping Police Violence. Parmi lesquelles un quart d’Afro-Américains, qui représentent seulement 13 % de la population. Joe Biden avait formulé le vœu pieu du «plus jamais ça», après la mobilisation historique et mondiale née du meurtre de George Floyd. God bless America… Les promesses de réforme ont finalement été abandonnées au Congrès, sous la pression des Républicains. Il en appelle aujourd’hui aux élus noirs pour faire avancer les choses. C’est pourtant l’affaire de tous.

Alexandra Parachini

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