Boulevard de la guerre

Place de Paris, de Metz ou de France, rue de Strasbourg, d’Anvers ou de Trèves, route d’Arlon, de Longwy ou de Chicago… et en 2023, un boulevard de Kiev. Le collège échevinal de la capitale a choisi de baptiser ainsi le nouveau tronçon de nationale 3 qui la reliera au sud du pays, par solidarité avec la capitale ukrainienne et pour marquer son soutien à ses habitants. Cela fait une belle jambe au combattant sous les bombes. Si l’information lui parvient !

L’occasion fait le larron, rebaptisons ! L’intention est peut-être bonne, mais le résultat du remue-méninges communal a du mal à passer. Ce ne sont pas les nouvelles rues en quête d’une identité qui manquent à Luxembourg. N’est-ce pas un brin exagéré pour une artère principale qui, qui plus est, est une des entrées dans la capitale ? Certains s’interrogent. Le futur boulevard de Kiev démarrera du pont Buchler pour relier la gare centrale à Howald et Hesperange en passant par la rue des Scillas. Son but est de réorganiser la circulation dans le sud de la ville en mettant l’accent sur la mobilité douce.

Les uns auraient préféré un nom d’inspiration plus locale, les autres proposent, pourquoi pas, de rebaptiser d’autres axes routiers du nom de batailles, de guerres et autres conflits armés contemporains : Srebrenica, Tahrir ou Alep, par exemple. Il ne devait pas y avoir de rues à baptiser à l’époque. Heureusement, quel que soit le conflit dont on s’émeut, on ne se contente pas de nommer des voies de circulation.

La démarche est maladroite et peut paraître politicienne, mais on ne connaît pas les autres noms en lice. Ce qu’on sait, pour conserver un registre national, c’est que la route d’Esch, la rue des Hauts-Fourneaux, l’avenue des Terres-Rouges et le boulevard de l’Alzette sont déjà pris, que plus personne – à moins de travailler au Tageblatt – ne sait qui était Hubert Clément, que Jean-Claude Juncker vit encore et qu’on ne veut pas de conflit de voisinage entre Dudelange, Berchem et Bettembourg. Dès lors, finie la Diddenuewener Strooss (la route de Thionville), vive la Kiewerstrooss (le boulevard de Kiev) !