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Autant en emporte leur vent

Le vent de révolte qui s’est levé sur l’Iran, depuis trois mois, est-il en train de s’engouffrer chez son voisin afghan? Trop tôt pour le dire, même si une brèche s’ouvre depuis plusieurs jours et l’interdiction faite aux étudiantes d’accéder à leurs universités. Au motif que nombre d’entre elles enfreignent le code vestimentaire, justifient les autorités talibanes d’un ton lapidaire. C’est bien le seul prétexte qui guide ces esprits tourmentés pour entraver la vie des femmes : les empêcher d’acquérir le savoir par tous les moyens. Car une femme instruite devient une femme libre. Et une femme libre représente un danger pour ces hommes dont le pouvoir ne repose que sur la peur et la soumission. Ainsi faut-il arguer que le hijab n’est pas correctement ajusté sur des têtes un peu trop pleines.

Un parallèle troublant qui fait écho aux évènements survenus mi-septembre, de l’autre côté des montagnes de l’ouest afghan. Les mollahs avaient eux aussi agité l’épouvantail du voile islamique pour expliquer l’arrestation et la mort de Mahsa Amini, Kurde iranienne de 22 ans. Le drame a embrasé la colère populaire que l’on connaît et mis le feu aux poudres à travers tout le pays. Les femmes, d’abord, ont brûlé ce qui symbolise l’oppression exercée sur leurs épaules et dansé sur les braises qui fument toujours. Attisées par les hommes, solidaires d’un combat devenu l’affaire de tous. En dépit d’une répression violente et des exécutions qui s’enchaînent. Il n’empêche que Téhéran est soudainement prise de stupeur et tremblements.

La situation n’a encore rien de comparable à Kaboul. Les rassemblements y restent, pour l’heure, sporadiques. Mais les interpellations déjà systématiques. Car le fond de l’air effraie, malgré tout. Et le timide frémissement bouillonne à mesure que gronde l’orage. Déjà, des enseignants ont démissionné vendredi et appelé leurs confrères à grossir le mouvement. Afin de relayer la protestation portée par les voix de celles qui se font entendre dans la rue. Défiant le joug des talibans et de leurs armes. Qu’importe si les balles sifflent, soufflent-elles. Autant en emporte leur vent, aux Afghanes et aux Iraniennes, et puisse-t-il faire trembler ces régimes sans foi ni loi.

Alexandra Parachini