1+1=1

Au tribunal, j’entends souvent qu’on veut réintégrer un prévenu dans la société ou le mettre à l’écart, car il représente un danger. Qu’est-ce que la société et à partir de quand la met-on en danger ? Une société est un groupe humain organisé et partageant une même culture, les mêmes normes, mœurs et valeurs, selon les ethnologues. Il ne faut pas nécessairement être un criminel ou un délinquant et présenter une tendance à la psychopathie ou des traits dyssociaux pour passer outre les règles, les lois et les normes sociales.

L’impact du manque d’empathie et de l’indifférence suffisent pour créer un point de rupture. Aujourd’hui, on ne réfléchit plus aux conséquences de ses actes, mais on déteste plus que tout être pris en défaut. Le «je» passe avant l’autre même quand il n’a rien à y gagner, sinon une pauvre sensation de pouvoir et une satisfaction aussi volatile qu’immédiate. Telle une masturbation frigide fondée sur l’impolitesse, l’égoïsme et une rébellion de sale gosse qui a perdu ses lettres de noblesse. Elle débouche sur autant de comportements dangereux qui tirent toute une société vers le bas et menacent sa cohésion.

En ce jour de fête nationale, nous célébrerons l’unité d’une nation entre démonstration de force à quiconque tenterait de l’attaquer et paillettes plein les yeux. Une parenthèse festive dans un pays que de plus en plus d’habitants ne comprennent plus et que d’autres ne cherchent pas à comprendre. L’intégration dans n’importe quel groupe social passe avant tout par un effort de compréhension. Un passeport et un salaire luxembourgeois sont à l’engagement envers la société l’équivalent d’une voiture en leasing. Un bonus.

Sans effort, les gens vivent en parallèle dans une incompréhension et une animosité croissantes. Se mettre à la place de l’autre devrait être une activité pratiquée dès le plus jeune âge plutôt que de mesurer sa valeur et celle de l’autre à l’aune de normes à géométrie variable qui ne confortent que nos ego. Souvenons-nous en en ce jour d’unité nationale, comme raisonnait par l’absurde Jean-Claude Van Damme : «1+1=1».