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TotalEnergies: frénésie autour des pompes, alors que la grève se poursuit


Photo : AFP

Le désarroi des automobilistes était palpable dans de nombreuses stations-service de France jeudi, souvent privées de tout ou partie de leurs carburants en raison d’une grève pour les salaires chez TotalEnergies, qui se prolonge depuis dix jours et bloque plusieurs raffineries. 15% des stations-service sont concernées selon le gouvernement.

« On est à sec depuis dimanche », témoignait jeudi le gérant d’une station TotalEnergies d’un quartier populaire de Paris, qui souhaitait rester anonyme.

Ses pompes étaient entourées d’un ruban de signalisation rouge et blanc pour inciter les automobilistes à poursuivre leur quête un peu plus loin. « Vous avez du diesel ? », s’enquiert un client, avant de repartir sans demander son reste lorsqu’on lui répond par la négative.

« Comme c’est moins cher, tout le monde vient chez nous », explique le gérant, en faisant référence à la remise à la pompe de 20 centimes accordée depuis le 1er septembre par TotalEnergies, outre la ristourne de l’Etat.

A cet afflux de clients s’ajoutent désormais les conséquences du mouvement de grève à l’appel de la CGT, qui réclame une revalorisation salariale de 10% pour l’année 2022.

« Habituellement, nous sommes livrés tous les deux jours, maintenant c’est tous les trois, quatre jours », a témoigné le gérant de station qui, pour la suite, n’a « pas d’informations ».

« Nous demandons une augmentation de 10%: 7% pour l’inflation et 3% pour le partage de la richesse », a déclaré le délégué syndical CGT de la raffinerie de Normandie, Pierre-Yves Hauguel, en marge d’une assemblée générale.

« Sur les six premiers mois de l’année », rappelle-t-il, TotalEnergies « a réalisé plus de 20 milliards d’euros de bénéfices » et « on s’attend à ce que ce soit 30 milliards à la fin de l’année ».

« On parle d’une situation qui concerne 15% des stations-service », a voulu rassurer jeudi soir sur BFM TV Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique.

« Nous sommes en train de renforcer les approvisionnements pétroliers depuis la Belgique et depuis Rouen, par bateau (…). Par ailleurs, effectivement, nous avons libéré quelques stocks stratégiques pour plus rapidement venir en soutien des pétroliers », a-t-elle expliqué, ajoutant que l’amélioration de la situation « va prendre deux, trois jours a priori ».

Contactée par l’AFP, la direction du groupe a indiqué que « la situation est stable ».

TotalEnergies, qui gère près d’une station-service de France sur trois, se refuse à communiquer le nombre de stations à sec, mais sa carte en ligne montre que la plupart de ses 3.500 points de vente manquent d’un ou plusieurs carburants.

Du nord au sud de la France, les automobilistes font la chasse aux stations ouvertes et, quand ils en trouvent, doivent faire longuement la queue. Comme Mahé Miredin, 34 ans, près du périphérique de Rennes jeudi matin, la jauge était dans le rouge: « C’est la deuxième station que je fais, je suis sortie pas loin et il n’y avait pas de diesel. »

« C’est tendu »

Sur plusieurs grands boulevards de Marseille, près de la moitié des stations étaient fermées et de nombreux automobilistes – plusieurs dizaines de véhicules -, faisaient la queue en espérant faire le plein devant celles ouvertes, a constaté l’AFP.

Et les problèmes vont continuer.

« Chacun des sites nous a indiqué la reconduction de la grève », a indiqué à l’AFP Thierry Defresne, secrétaire CGT du comité d’entreprise européen TotalEnergies SE.

La raffinerie de Normandie, à l’arrêt, est toujours en grève, tout comme la « bio-raffinerie » de La Mède (Bouches-du-Rhône) et le dépôt de carburant de Flandres, près de Dunkerque (Nord).

« La base de chargement est bloquée » aussi à Grandpuits (Seine-et-Marne), un site en cours de reconversion en « bio-raffinerie » qui entre occasionnellement dans le mouvement.

Une grève touche également les deux raffineries françaises d’Esso-ExxonMobil, aussi pour les salaires.

« C’est tendu », confirme Francis Pousse, président des stations-service et énergies nouvelles au sein du syndicat professionnel Mobiliance (entreprises des services de l’automobile) qui représente 5.800 stations-service traditionnelles (hors grande distribution).

S’il souligne que depuis le début de septembre, « avant même la perturbation de l’outil industriel, les stations du pétrolier français étaient en tension », il ajoute qu' »une réorganisation de la logistique » est désormais nécessaire du fait du conflit, créant « un temps d’approvisionnement des stations beaucoup plus long ».

« On n’est pas en pénurie, puisqu’on a des plans B », avec l’importation de produits » qui a été « renforcée », tempère-t-il.