L’équipe luxembourgeoise du lycée des Arts et Métiers (LTAM) a participé, la semaine dernière, au Shell Eco Marathon à Londres. Leur prototype «Eco-Töff II» a parcouru 480 kilomètres avec un litre d’essence.
Pour le lycée des Arts et Métiers de Luxembourg, le Shell Eco Marathon n’a rien d’une découverte. La première participation remonte à 2009. «Depuis lors, on participe tous les ans», affirme Georges Gloesener, professeur au LTAM et ingénieur en génie mécanique. Cette année, huit élèves et cinq professeurs ont pris part à la compétition à Londres, mais «durant l’année, souligne Georges Gloesener, davantage d’élèves ont participé» au projet (NDLR : 25 en tout).
L’équipe installée dans son paddock décoré du drapeau luxembourgeois a décidé de garder le châssis de l’an passé. Pour ce qui est de la carrosserie, le choix a été tout autre. Les élèves en ont construit une nouvelle. «En octobre 2015, on a commencé à construire les formes (…) On a créé un moule en plâtre et un contre-moule», se souvient le professeur. Terminée entre avril et mai dernier, la «carcasse» du prototype luxembourgeois est «laminée en fibre de verre», précise Georges Gloesener. «Beaucoup d’équipes en font construire une, dit-il, c’est plus intéressant de la faire», car de cette manière, les élèves fabriquent eux-mêmes leur véhicule.
Une seule pilote à bord
«Eco-Töff II» est bien trop fluet pour supporter de gros pneus. Il a été doté de «roues de bicyclette qu’on a construites nous-mêmes avec des freins à disque à l’arrière», pointe l’ingénieur, des roues gonflées à bloc afin d’éviter le plus possible les frictions sur l’asphalte. Comme tout véhicule, il dispose de freins qui sont vérifiés, ainsi que l’ensemble de la machine, lors du contrôle technique (voir encadré ci-dessous). Bien que l’équipe dispose de deux pilotes Melina et Eve, «une seule personne peut rentrer à bord», indique le professeur. Elle doit peser au minimum 50 kilos. «Car le poids joue un rôle», avance-t-il. «Eco-Töff II» pèse exactement 53 kilos.
Et sur le circuit, comment ça se passe ? Une fois entré en piste, l’engin doit atteindre la vitesse maximum de 35 km/h. Lorsque c’est le cas, la pilote doit relâcher la pédale d’accélération et laisser la vitesse descendre à 20 km/h. À ce moment-là, elle coupe le moteur. Ensuite, elle le redémarre «entre cinq et six secondes», accélère jusqu’aux fameux 35 km/h puis relâche une fois de plus l’accélérateur et «ainsi de suite», ajoute Georges Gloesener.
Quatre tentatives
Melina et Eve ont eu huit tours de piste de 2,240 kilomètres de longueur à faire «en 43 minutes» soit en tout 17,9 kilomètres. «Le dernier tour est un peu plus court, car il est avant le départ», commente l’ingénieur. Au moment où nous avons interrogé l’équipe luxembourgeoise, elle avait parcouru la veille, lors de l’entraînement, 379 kilomètres tout en consommant quelques millilitres d’essence. «Aujourd’hui (NDLR : vendredi dernier) c’est la première compétition réelle. Maintenant, on a quatre manches, c’est-à-dire qu’on peut prendre quatre fois le départ et c’est le meilleur résultat qui compte.» Le lendemain de l’entretien, «Eco-Töff II» avait déjà parcouru 417,8 kilomètres en un essai, sur un circuit plus compliqué qu’en 2015 et se trouvait à la 5e place. La petite équipe était contente de ce premier résultat. Il a tout de même fallu effectuer une légère réparation, avant que le prototype ne reprenne le chemin de la course.
Ainsi, le dimanche, dernier jour de compétition, le petit bolide avait parcouru 480 kilomètres avec son litre d’essence… rouge. «Je suis contente de rouler le prototype parce que j’aime conduire et c’est rigolo», confie Melina. De son côté, Eve fait remarquer que «les autres équipes sont vraiment très gentilles. Sur la piste on peut être concurrents, mais en dehors, c’est très amical».
De notre envoyée spéciale à Londres, Aude Forestier
Bolide vérifié de A à Z
Avant de rouler sur la piste, chaque petit bolide passe au contrôle technique. Peut-être autant redouté que celui de Sandweiler pour les automobilistes luxembourgeois, ce passage obligé permet de vérifier si les équipes sont en conformité avec le règlement de la compétition. En moyenne, 100 points sont contrôlés, «cela dépend du concept et de la catégorie d’énergie», explique Gilles Vanier, directeur technique du Shell Eco Marathon.
Les vérifications vont du casque et de la tenue du pilote en passant par le poids du véhicule, la ceinture de sécurité, la capacité de sortir rapidement de la voiture et les freins. La vérification de ces derniers se font sur une rampe à 20%. «Lorsque la voiture freine, elle ne doit pas bouger», commente Gilles Vanier. Une fois que le véhicule a passé l’épreuve avec succès, y sont apposés sur la carrosserie deux autocollants. Le bleu valide l’aspect technique du véhicule, le rouge indique qu’il répond aux normes de sécurité.
Une compétition à l’ancienne
À l’origine un défi entre scientifiques, l’Eco Marathon est devenu au fil des ans un rendez-vous mondial.
Le premier Eco Marathon s’est déroulé en 1939 au laboratoire de recherche du pétrolier aux États-Unis. Il s’agissait d’un pari entre scientifiques sur les économies de carburants. Ces derniers se demandaient qui pourrait faire le plus de kilomètres par litre d’essence.
La version européenne de la compétition a débuté en France en 1985 sur le circuit Paul-Ricard du Castellet, dans le sud de la France, avec 25 véhicules fabriqués à l’aide de bois. Elle est restée sur cette piste jusqu’en 1999.
Un an plus tard, elle a rejoint le circuit Paul-Armagnac à Nogaro, dans le sud-ouest de la France. En 2009, la compétition s’installe à Lausitz en Allemagne puis, en 2012, elle prend place à Rotterdam où, pour la première fois, les petits bolides ont roulé dans un circuit installé en pleine ville. Cette année, le marathon s’est déroulé à Londres au pied du stade olympique construit à l’occasion des Jeux de 2012 et à côté de la tour Orbit d’ArcelorMittal.
La compétition ne se déroule pas seulement sur le Vieux Continent. Il existe des versions américaine et asiatique. La première, qui existe depuis 2007, a eu lieu cette année à Detroit, aux États-Unis. La seconde, mise en place en 2010, s’est installée à Manille, aux Philippines.