La crise sanitaire du Covid-19 ébranle tous les secteurs de l’économie, de l’industrie au commerce, en passant par l’Horeca, les start-up, les indépendants, les petites et moyennes entreprises ou encore la finance.
Si le secteur de la finance est souvent vu de façon globale, il se décompose en plusieurs parties, dont l’industrie des fonds d’investissement. Au Luxembourg, cette industrie occupe environ 15 000 personnes pour plus de 4 500 milliards d’euros d’actifs sous gestion en 2019. Ce pan de l’économie luxembourgeois n’a pas échappé à la crise sanitaire et l’Association luxembourgeoise des fonds d’investissement (ALFI) est en train de tout mettre en œuvre pour limiter les dégâts. Mieux encore, les fonds d’investissement devraient, entre autres, servir lors de la relance économique à la sortie de cette crise.
On peut constater que cette industrie a rapidement su se mettre au télétravail. «Très tôt, la question de savoir si les gestionnaires d’actifs pouvaient continuer à opérer normalement s’est posée dans le secteur. Dès le début de la crise, et même un peu avant, le télétravail s’est très vite mis en place», explique Corinne Lamesch, la présidente de l’ALFI, avant d’ajouter : «Ils ont très vite déclenché leurs plans de continuité. Ce sont des plans qui sont testés régulièrement et donc qui fonctionnent très bien et on peut rapidement déployer le télétravail. Je crois que l’on peut dire aujourd’hui que la majorité du personnel de notre secteur est en télétravail. Seul le personnel impliqué dans des fonctions clés travaille physiquement sur place.»
De son côté, l’ALFI a mis en place un inventaire afin de connaître les problèmes auxquels sont confrontés les gestionnaires de fonds en cette période délicate. «Nous sommes en contact continu avec les acteurs de l’industrie des fonds d’investissement luxembourgeois, mais également avec nos homologues européens et internationaux. Nous avons mis en place un inventaire destiné à récolter tous les problèmes rencontrés par les gestionnaires. Le but étant pour nous de tenter d’y répondre, mais aussi de les faire remonter de manière coordonnée aux autorités compétentes, que ce soit la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) ou le ministère des Finances», explique encore la présidente de l’ALFI.
Protéger les épargnants et investisseurs
Sans entrer dans les détails techniques de l’industrie des fonds d’investissement, force est de constater que le secteur financier voit actuellement plus de rouge que de vert. «Les principaux marchés boursiers ont perdu environ 30 %. De plus, on voit également que la liquidité dans certaines classes d’actifs est clairement sous pression. Il faut comprendre la situation macroéconomique. Les économies locales et mondiales font face à une pression considérable. De plus, même si les mesures de confinement sont une très bonne chose au niveau sanitaire pour endiguer la pandémie, cela touche durement l’activité économique», explique Corinne Lamesch. Pour autant, la présidente de l’ALFI tente de rassurer : «Dans cette industrie des fonds d’investissement, il faut garder la tête froide et avoir une vision à long terme. C’est le message qu’il faut faire passer à l’investisseur et à l’épargnant», qui sont, rappelons-le, à la base des actifs des fonds d’investissement. «Actuellement, le principal souci des gestionnaires de fonds est de protéger au mieux les intérêts des investisseurs, cela veut dire, entre autres, s’intéresser de près à la liquidité. Pour cela, il existe des techniques et des méthodes autorisées par le cadre légal afin de protéger les investisseurs qui souhaitent rester investis dans les fonds.»
Se préparer à la relance économique
Si, pour le moment, les gestionnaires d’actifs, qui travaillent à protéger les intérêts des investisseurs afin qu’ils gardent le «goût» d’investir, ne peuvent pas réellement aider les entreprises et les gouvernements à lutter directement contre le coronavirus, l’industrie des fonds d’investissement devra jouer un rôle prépondérant lorsque la crise sera terminée et qu’il faudra relancer la machinerie économique, ainsi que le souligne, pour sa part, le directeur de l’ALFI, Camille Thommes : «Hors crise, le secteur de la gestion collective est un maillon important de l’économie dans la mesure où il canalise les investissements des épargnants et des investisseurs, qu’ils soient privés ou institutionnels, dans l’économie, donc dans les sociétés, les start-up, des projets à vocation durable, etc., où l’industrie des fonds d’investissement joue un rôle significatif. Il est vrai qu’en ce moment l’industrie des fonds s’efface un peu face à cette crise sanitaire. Par contre, je pense qu’une fois que l’on aura vaincu cette crise, l’industrie des fonds aura un rôle à jouer pour participer à la relance de la croissance et de l’économie. Et je crois que l’industrie des fonds, avec un cadre réglementaire et fiscal attrayant, peut permettre aux investisseurs d’investir dans les différents secteurs économiques.»
Considérant l’après, Camille Thommes souligne «qu’il serait bon de réfléchir déjà à un programme de relance et je suis certain que des réflexions dans ce sens commencent à être menées pour fédérer tous les acteurs afin de soutenir une relance de l’économie au Luxembourg et au-delà.»
En attendant, le secteur ne reste pas insensible à la crise du Covid-19. «La situation actuelle aura évidemment une incidence sur le secteur des fonds, concède Corinne Lamesch. En regardant les derniers chiffres, on peut constater qu’en janvier les actifs nets sous gestion se montaient à 4 780 milliards d’euros, ce qui était un record pour la place luxembourgeoise. En février déjà, en raison de baisses sur les marchés et d’une tendance au rachat de la part des investisseurs, les actifs nets sous gestion ont baissé à 4 668 milliards d’euros. Et il est encore trop tôt pour regarder les chiffres de mars.»
Jérémy Zabatta