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Luxembourg : les commerçants mettent le télétravail en cause


Pause de midi, achat après le travail... les enseignes luxembourgeoises font d'autant plus la grimace que la main d'oeuvre habite à 46% derrière les frontières (Photo d'illustration : AFP).

C’est passé relativement inaperçu :  jeudi, lors de l’annonce du plan « Smile again » en faveur des commerces et artisans luxembourgeois, l’Horesca et la CLC ont fustigé les conséquences du télétravail sur leurs chiffres d’affaires.

Claude Bizjak, directeur adjoint de la Confédération luxembourgeoise du commerce (CLC), a été le plus direct sur la question, estimant que le télétravail n’aidait pas à la relance, « alors que les consommateurs présents sont déjà hésitants ». Alain Rix, président de l’Horesca, a nuancé : « il n’y a pas de règle générale. Mais c’est vrai que les grosses entreprises en Ville sont encore ‘vides’ et que ça pèse. Les restaurants en périphérie sont moins touchés. » En clair : tous ces actifs qui bossent derrière un écran au lieu d’être au Kirchberg, à Belval ou Boulevard Royal, c’est un gouffre pour les restaurants, bars et commerces des alentours. Le propos vaut à plus forte raison que 46% de la main d’oeuvre luxembourgeoise est frontalière : ils sont chez eux à midi -comme les autres télétravailleur résidents- mais aussi le soir après le boulot… mission impossible pour les capter en « after-work » quand il s’agit de refermer l’ordinateur portable.

Il y a là un enjeu économique certain, y compris en répercussion, pour les finances luxembourgeoises et les rentrées en TVA.

Paradoxe frontalier

Mais on ne peut que s’interroger sur l’affrontement désormais habituel entre l’économie et l’écologie : faut-il remettre le plus rapidement possible 200 000 frontaliers sur le rail et sur la route pour aider les restaurateurs et les commerces du pays ? Bouchons monstres, pénibilité au travail et vie sociale détériorée sont plutôt des expressions du « monde d’avant », croyait-on.
Autre paradoxe fort : de nombreux postes de l’Horesca et du commerce sont occupés par des frontaliers eux-mêmes. Donc : actifs et consommateurs implantés de l’autre côté de la frontière sont priés de venir faire leur tambouille conjointement au Luxembourg, pour ne pas faire du Grand-Duché qu’un lieu de « substance de travail », pour la nommer ainsi, dans le cadre du travail dématérialisé ? Sur un plan économique ça se tient. Sur un plan sociétal et environnemental, ça devient très discutable.

Hubert Gamelon