Fédération des artisans et Chambre des métiers redoutent que pandémie et guerre en Ukraine vont avoir un impact négatif durable sur le Luxembourg et son économie. Une profonde remise en question serait indispensable.
À la fin d’un discours qui s’est voulu à la fois alarmant et pessimiste, le président de la Chambre des métiers, Tom Oberweis, a cherché à ne pas trop gâcher le traditionnel pot des présidents de l’artisanat luxembourgeois : «Je ne comptais pas dresser une image trop sombre de l’avenir du pays. Néanmoins, nous sommes profondément convaincus que le moment est venu de prendre un nouvel élan face à une nouvelle réalité. La peur est mauvaise conseillère. Il en va de même de la complaisance et de la commodité.»
La conclusion livrée face à un parterre de quelque 300 personnes, hier soir, repose sur une situation économique qui serait bien plus grave que d’aucuns ne veulent le faire croire. Sans le citer, Tom Oberweis s’est attaqué à son tour au syndicat OGBL qui «en ces temps de crise absolue, opère avec des revendications maximalistes, sans volonté aucune d’accepter des compromis et qui n’est apparemment pas à même de reconnaître les défis auxquels le pays est confronté».
Si la Chambre des métiers, et avec elle, la Fédération des artisans, saluent l’accord tripartite conclu le 1er avril (lire ci-dessus), Tom Oberweis n’a pas manqué d’égratigner également les deux autres syndicats nationaux, tout comme le gouvernement, pourtant loué en début de discours pour l’aide apportée aux entreprises lors de la pandémie.
«On n’a toujours pas réussi à mener un débat factuel sur la productivité et la compétitivité. Les syndicats refusent la discussion, le camp politique n’ose pas l’engager. Mais il s’agit bien d’une thématique clé, que nous le veuillons ou pas», fustige le président de la Chambre des métiers. Il serait grand temps de «mener un sérieux débat sur le modèle économique du Luxembourg».
Les entreprises se verraient aujourd’hui confrontées à la fois à une crise de l’inflation, une crise d’approvisionnement et une crise énergétique. «Les effets de la pandémie se font toujours sentir, notamment sous la forme de chaînes d’approvisionnement perturbées et de hausses des prix des matériaux, des matières premières et de l’énergie. La guerre en Ukraine rend la situation encore plus alarmante», clame Tom Oberweis.
Gouvernement et syndicats visés
Aujourd’hui, l’économie se trouverait face à un tournant majeur. L’attractivité du Luxembourg pour les investisseurs serait plus que jamais menacée. «Au vu du manque de soutien qui semble prévaloir, une politique industrielle n’est plus que possible dans la douleur. Les PME n’arrivent plus à organiser leur travail et comptent d’ores et déjà parmi les moins rentables en Europe. Or, sans une économie compétitive, sans productivité, sans innovation ou sans investissements étrangers, le niveau de vie au Luxembourg va baisser. Aucune exception n’est faite pour le petit et sage Luxembourg ou bien si les syndicats et le gouvernement croient que les règles du jeu mondiales ne s’appliquent pas chez nous. Nous devons prendre conscience que le succès économique, qui est la base pour les salaires élevés et l’État-providence performant, ne va pas de soi», met en garde Tom Oberweis.
Le camp politique a été appelé, hier, à se pencher au plus vite sur un «modèle d’avenir» pour le Luxembourg et son tissu économique. «Le Luxembourg a déjà prouvé à plusieurs reprises que nous pouvons être innovants et agiles en période difficile», souligne le président de la Chambre des métiers. Il s’attend à des réponses concrètes au défi économique, énergétique et social qui se présente au pays.