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Le Brexit, une aubaine pour les ostréiculteurs irlandais


Les parcs à huîtres de l'estuaire de Lough Foyle sont un véritable far-west : une zone de non-droit où beaucoup de producteurs opèrent clandestinement. (photos AFP)

D’aucuns redoutent les conséquences du Brexit. Pas les ostréiculteurs irlandais de l’estuaire de Lough Foyle, qui misent sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne pour favoriser leurs exportations et mettre à l’index les fermes clandestines.

C’est un petit bout de littoral peu industrialisé à la pointe nord du pays, collé au voisin nord-irlandais. Mais malgré son charme bucolique, la région n’a pas su capitaliser sur sa beauté pour attirer les touristes, la faute au trajet de plus de trois heures qu’il faut effectuer pour s’y rendre depuis la capitale, Dublin.

Depuis les rivages de la péninsule d’Inishowen, il est possible d’apercevoir les parcs à huîtres, dont la production part surtout vers la France, qui constitue, de loin, le plus gros débouché pour les ostréiculteurs irlandais.

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Au cœur du problème se trouve la question de la souveraineté des eaux de l’estuaire, dont le statut n’avait pas été fixé lors de la partition de l’île en 1921, dans la foulée de la guerre d’indépendance.

Le vide juridique a permis le développement d’une ostréiculture sauvage, au grand dam des propriétaires de fermes agréées qui affirment que la situation met leur activité en péril.

« Où sont les frontières ? »

Ils comptent aujourd’hui sur le Brexit pour y remédier. « Depuis près d’un siècle le problème n’a pas été traité, le Brexit va maintenant contraindre les deux parties à le régler une bonne fois pour toute », espère Seamus Bovaird, ancien directeur de la coopérative des pêcheurs de l’estuaire.

Un Irlandais pro-Brexit ? Ce discours a de quoi surprendre alors que des deux côtés de la frontière irlandaise, c’est souvent l’inquiétude qui prédomine parmi habitants et commerçants, préoccupés de voir surgir des contrôles douaniers à l’issue de la sortie du Royaume-Uni du giron européen.

Le Brexit permettra de clarifier, d’un point de vue légal, le tracé des frontières au niveau de l’estuaire, renchérit Enda Craig, membre de la Loughs Agency, une organisation transfrontalière chargée de la supervision de la zone, mais dépourvue de prérogatives sur l’aquaculture. « Cela forcera la main du gouvernement irlandais, parce que quand le Royaume-Uni partira, l’UE demandera où sont ses frontières. »

Quelques chiffres témoignent de l’urgence du problème : en l’espace de quatre ans, le nombre de parcs à huîtres est passé de 2 000 à 30 000, dont une majorité opèrent sans autorisation, selon la Loughs Agency.

Au far-west ostréicole

Une situation qui n’est pas sans rappeler la ruée vers l’or au Canada à la fin du XIXe siècle, souligne Enda Craig. « C’est l’équivalent irlandais »,assure-t-il. « Une ruée vers l’or de la mer sans régulation, sans garantie sanitaire ni supervision de la sécurité ou contrôles environnementaux. »

La coexistence des deux ostréicultures, l’une autorisée, l’autre pas, pose en effet le risque de voir deux types d’huîtres ne répondant pas forcément aux mêmes critères sanitaires, et mélangées une fois passées entre les mains d’intermédiaires.

En décembre, la ministre de la Pêche nord-irlandaise Michelle McIlveen avait tiré la sonnette d’alarme en prévenant que le manque de régulation constituait un « risque pour la sécurité et la santé publique ».

Les propriétaires de fermes sauvages considèrent eux qu’ils sont dans leur bon droit. Mais refusent néanmoins de répondre lorsqu’on les interroge sur leurs activités.

« Aussi sûr que deux et deux font quatre, quelqu’un sur le continent finira par être hospitalisé après une intoxication alimentaire et cela ternira la réputation de toutes les huîtres irlandaises », lâche Seamus Bovaird.

Le Quotidien/AFP