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La direction de Guardian dit «n’importe quoi», selon l’OGBL


En juillet dernier, l'OGBL et les salariés s'étaient mobilisés pour dénoncer le manque de communication avec la direction du groupe Guardian (photo : Alain Rischard).

L’OGBL n’a pas mâché ses mots après les récentes déclarations du vice-président Europe de Guardian sur les raisons du futur plan social devant toucher 201 salariés sur 453 travaillant dans les deux sites du pays.

Alors que le groupe américain Guardian, présent au Luxembourg depuis 1981, souhaite se séparer de 44 % de ses effectifs dans le pays, soit 201 postes sur 453, Guus Boekhoudt, le vice-président exécutif de Guardian Industries et directeur général de Guardian Europe SARL, s’est expliqué dans une interview accordée au Luxemburger Wort.

Le dirigeant n’a pas caché qu’environ 200 emplois seront touchés à la suite de «la fusion de la production et la fermeture du four à verre flotté à Dudelange», tout en se voulant rassurant en affirmant que l’activité laminage y restera en activité et que l’usine ne sera pas fermée.

De plus, Guus Boekhoudt a souligné que le groupe était en train de travailler sur le remplacement d’un four, voire de deux fours, par un équipement «flambant neuf»,  sans savoir sur quel site, entre Dudelange et Bascharage, un tel équipement sera installé. Celui de l’usine de Dudelange est définitivement à l’arrêt et celui de Bascharage arrivera en fin de vie d’ici la fin de l’année 2022.

Une surcapacité de production mise en avant

Le dirigeant est resté vague sur le sujet en expliquant qu’il ne pouvait donner aucune garantie en la matière et qu’un tel investissement devait se prendre avec une vision sur les 15 à 18 prochaines années.

Guus Boekhoudt a aussi expliqué à nos confrères du Wort que la réduction de l’activité au Luxembourg est surtout due à une surcapacité de production de verre en Europe de l’Ouest en plus de coûts de transport très élevés avec en toile de fond la crise du Covid-19 qui a plongé dans l’incertitude le secteur de la construction et l’appétit pour la construction de grands bâtiments.

Des déclarations qui n’enchantent guère l’OGBL, qui s’est déjà positionné contre un plan social, préférant la mise en œuvre d’un plan de maintien dans l’emploi. «Je vais rappeler qu’en 2019 les sites luxembourgeois étaient rentables. De plus, sur le marché du verre, il y a toujours des fluctuations et il est un peu trop facile de mettre la faute sur le dos du coronavirus alors que l’on voit que Guardian investit au Royaume-Uni, en Hongrie et en Pologne. Je vais également rappeler qu’il y a encore deux ans, Guardian avait fait des promesses en termes d’investissements», assure Alain Rolling, secrétaire central adjoint à l’OGBL.

Du verre luxembourgeois de Dubai à Bordeaux

La fusion des deux sites luxembourgeois de Guardian et le manque d’investissement concret, couplés à la volonté de se séparer de près de la moitié de ses effectifs alors que dans le même temps Guardian est en train d’ouvrir un énorme site de production en Pologne, restent encore en travers de la gorge de la délégation du personnel et de l’OGBL.

Guus Boekhoudt a pourtant assuré lors de l’interview au Wort que «l’usine polonaise n’est pas appelée à remplacer celle de Dudelange. Croire cela serait une interprétation totalement erronée, car le site de production doit impérativement être situé dans un rayon de 300 à 400 kilomètres autour du client. Produire du verre en Pologne pour le livrer ensuite à un client au Luxembourg, à 1 200 kilomètres, n’aurait donc aucun sens, économiquement parlant. L’usine que nous construisons actuellement en Pologne est strictement destinée au marché polonais.»

Des propos étonnants quand on sait que l’usine de Bascharage a notamment produit les quelque 150 000 m² de vitrage pour la Burj Khalifa à Dubai, soit à un peu plus de 6 000 kilomètres du Luxembourg, ou encore des éléments de façade «made in Luxembourg» toujours produits par Guardian installés à la Cité du Vin de Bordeaux (950 kilomètres du Grand-Duché) ou à la Philharmonie de Hambourg (630 kilomètres du Grand-Duché).

Des propos «irréalistes»

«C’est tout simplement du n’importe quoi. Évidemment que les usines luxembourgeoises ont livré du verre un peu partout dans le monde», s’emporte Alain Rolling, qui n’hésite pas à affirmer que «l’on est clairement dans un cas de délocalisation de l’activité. Les propos en question sont totalement irréalistes.»

Début juillet, Vincent Collin, le président de la délégation du personnel de Bascharage, avait également mis le doigt sur un changement de priorité de la direction du groupe avec le temps en soulignant «que depuis la reprise de Guardian par le groupe américain Koch Industries en 2016, il y a eu un changement notoire de la chaîne de valeur en privilégiant le profit à l’humain».

Jeremy Zabatta