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« Il est temps d’arrêter ce cirque » : la saga du Brexit désespère la City


"Nous sommes au bord du précipice. Les politiciens de toutes tendances doivent dépasser leurs divergences", supplie Catherine McGuinness, la plus puissante responsable politique de la City de Londres. (illustration AFP)

Les milieux d’affaires britanniques se désespéraient de la saga autour du Brexit après le nouveau rejet au Parlement de l’accord avec Bruxelles et imploraient les députés de rejeter mercredi toute sortie abrupte.

« Il est temps pour le Parlement d’arrêter ce cirque », s’arrachait les cheveux Carolyn Fairbairn, la patronne des patrons du pays. Fustigeant « l’échec des politiques », la directrice générale de la principale organisation d’employeurs, la CBI, espérait désormais que le Parlement « ferme la porte de façon urgente » à un Brexit dur.

Mardi soir, les députés à Westminster ont clairement, pour la deuxième fois, rejeté l’accord conclu péniblement par la Première ministre Theresa May avec les dirigeants des 27 autres pays de l’UE sur les conditions du divorce. Conséquence, ils doivent dire mercredi s’ils acceptent un départ sans accord le 29 mars, une éventualité redoutée par les milieux d’affaires qui craignent une série de catastrophes.

« Nous sommes au bord du précipice. Les politiciens de toutes tendances doivent dépasser leurs divergences » pour éviter un Brexit sans accord, suppliait Catherine McGuinness, la plus puissante responsable politique de la City de Londres – poumon financier du Royaume-Uni et de l’Europe. Les économistes et la Banque d’Angleterre ont averti des sévères conséquences d’un tel scénario pour la croissance. La livre chuterait, faisant bondir les prix des importations et flancher la consommation des ménages. Des complications administratives pourraient entraîner des queues monstres dans les ports de marchandises.

L’industrie auto en première ligne

« Un Brexit sans accord serait catastrophique pour l’industrie automobile. Cela mettrait fin au commerce sans entrave avec l’UE, coûterait des milliards en coût de production supplémentaires et entraînerait des suppressions d’emplois », a prévenu le directeur général de l’association britannique des constructeurs d’automobiles. Si toute l’industrie est vulnérable, les fabricants de voitures sont en première ligne. Plusieurs annonces de réduction de production au Royaume-Uni, et même d’une fermeture d’usine chez Honda, ont marqué les esprits ces dernières semaines.

Signe que le gouvernement prend l’hypothèse d’un Brexit dur au sérieux, il a publié une série de mesures qui s’appliqueraient pour en atténuer les conséquences : Londres réduirait notamment ses droits de douanes qui ne concerneraient plus que 13% des produits importés. A l’inverse des milieux patronaux, les marchés réagissaient avec calme au rejet de l’accord de sortie. La livre sterling tenait bon et montait légèrement face au dollar et à l’euro mercredi vers 9h. « Le marché est assez confiant, il ne devrait pas y avoir de Brexit sans accord » car les députés devraient voter contre dans la soirée, a confié Michael Hewson, analyste chez CMC Markets.

Presque trois ans après le référendum, les rebondissements de ce feuilleton font désormais partie du paysage pour les opérateurs scrutant leur mur d’écrans informatiques. La Bourse de Londres était d’ailleurs stable une heure après son ouverture, même si des valeurs bancaires comme Lloyds ou industrielle comme Rolls-Royce souffraient quelque peu de l’incertitude persistante. Les grands acteurs financiers ont beaucoup à redouter de la sortie de l’UE, qui implique la perte du passeport financier européen, sésame qui leur permet de proposer des services sur tout le continent depuis le Royaume-Uni.

Si les députés rejettent mercredi soir l’hypothèse d’un Brexit abrupt pour le 29 mars, ils devront voter jeudi pour demander ou non un report du Brexit.

LQ/AFP